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Professeur Martinov 7 – Professeur Martinov et la vierge de Cardillac 4 – L’hôtel du coq bleu par Maud Anne Amaro
4 – L’hôtel du coq bleu
Installé dans son diocèse, Richard refusa systématiquement les invitations chez les notables locaux. Ces derniers le prirent mal, ne manquant pas de faire des comparaisons avec l’ancien curé. Sa cote était au plus bas et dégringola encore un peu plus quand un jour on le chercha pour une extrême onction, sans le trouver. Il s’en fichait, ce n’était pas avec les habitants locaux qu’il escomptait créer le déclic qui en ferait un gourou reconnu.
Il fallait pourtant qu’un jour l’occasion se présente. Le mariage de Sidonie lui en donna l’occasion. Une pauvre fille que la nature avait oublié de gâter, mais héritière potentielle d’une jolie petite fortune avait fini par se faire mettre le grappin dessus par un coureur de dot d’un village voisin. La noce promettait son plein de participants venus de tous les alentours et même de plus loin. La veille, il vérifia la statue, il en maîtrisait désormais parfaitement le mécanisme et les leçons de prestidigitation qu’il avait assimilées lui seraient d’un grand secours. Tout était minuté, le miracle ne pouvait avoir lieu qu’après le mariage, mais tout de suite après, dans la foulée…
Effectivement, alors que Richard demandait à la foule de prier pour le bonheur des jeunes mariés, on put alors le voir interrompre sa propre prière, s’agenouiller brusquement aux pieds de la statuette les bras en croix. La foule des fidèles fut d’abord interloquée avant que les premiers d’entre eux réalisent ce qui était en train de se passer.
Une femme cria : « On dirait que la statue saigne ! » et s’agenouilla en se signant imitée bientôt par la quasi-totalité de la noce !
Richard jubilait, il n’en espérait pas tant. Il attendit quelques petites minutes, puis élevant le verbe il prit la parole en ces termes :
– Mes bien chers frères, mes bien chères sœurs, il vient de se passer quelque chose ! Il est possible, je dis bien il est possible, qu’il s’agisse d’une manifestation de notre bien aimée vierge Marie, il est bien trop tôt pour le dire et je ne manquerai pas de reporter ce que nous avons tous vu à Monseigneur l’évêque. Cette statuette, voyez-vous, m’a été apportée mardi dernier par un jeune garçon que je n’avais jamais vu, il semblait dans un certain état de confusion et avait du mal à s’exprimer, j’ai cru comprendre qu’il l’avait trouvée dans une cabane abandonnée, dans la forêt et il paraissait persuadé qu’elle accomplissait des miracles. Il est parti très vite. Je me suis retrouvé seul avec la statue que j’ai nettoyée et comme je l’ai trouvée très belle, je l’ai placée ici après l’avoir bénie. J’ose espérer ne pas avoir été victime d’une sorte de charlatan qui voudrait mettre notre foi en dérision. Après la cérémonie, s’il y a de gens qui ont des idées sur ce qui vient de se passer, je peux leur accorder cinq minutes…
Il se demanda si son discours allait passer ! Il fut rassuré quelques minutes plus tard : d’une part par le résultat de la quête qui fut royale, puis par la vingtaine de personnes qui s’agglutinèrent autour de lui à la sortie. Une explication miraculeuse sans réserve aurait semé des doutes. Par contre tous ces gens n’avaient pas grand-chose à exposer et espéraient que Richard leur en dirait plus sous forme de confidence. Il déclara alors que s’il y avait du nouveau, il le ferait savoir à la messe dominicale… Puis un homme se détacha du groupe :
– Je suis journaliste au « Clairon du Centre », vous verriez un inconvénient à ce que je fasse un petit papier sur ce qui s’est passé ?
– Si vous me promettez de ne pas verser ni dans le sensationnel, ni dans le rationalisme… pourquoi pas ?
– Je serais neutre, soyez rassuré… mais c’est vrai que les statues truquées, ça existe, me permettriez-vous de l’examiner ?
– Mais bien sûr ! Pas maintenant il faut que j’y aille, mais passez-moi un coup de fil, nous prendrons rendez-vous…
C’était inespéré ! Dès le surlendemain, le journaliste en question s’escrima pendant une demi-heure avec la statuette non truquée, et repartit dubitatif… un peu déçu même ! Sceptique dans l’âme, il avoua dans son article n’avoir rien trouvé de suspect sur la statuette, mais se promettait d’approfondir le problème, ce qu’il ne fit jamais. L’évêché fut prévenu, Richard raconta l’affaire à sa façon, minimisant les faits et insistant sur un possible trucage. Il n’y eut aucun remous de ce côté-là ! Le dimanche suivant, la foule des fidèles avait doublé, le miracle se reproduisit, la quête fut excellente… tout allait bien…
Et le succès alla crescendo… à ce point que l’église devint trop petite pour accueillir tout ce monde, puisque maintenant on y venait des environs et même de plus loin en cars collectifs…. Le père de la mariée prêta gracieusement un terrain, et fournit un chapiteau pour les jours de mauvais temps. Cette décision raviva les querelles dans le village mais Richard n’en avait cure, il encaissait les bénéfices… Il s’entoura d’un petit groupe de bénévoles qui l’aidaient à préparer matériellement la messe… Quant à l’église, le dimanche, elle était fermée, sinon les autres jours, quand elle était ouverte les fidèles pouvait s’agenouiller devant la statue non truquée… ce qui n’empêchait pas certains de déclarer l’avoir vu pleurer aussi… il faut toujours se méfier de ce que les gens racontent.
La position attentiste de l’évêché ne fut pas éternelle, sommé de s’y déplacer et de s’expliquer, il tergiversa, et ses explications passèrent… mais il ne se faisait aucune illusion, la rupture avec l’église officielle était inévitable, il en avait eu besoin, elle représentait désormais un inconvénient…. Il fallait maintenant qu’il crée sa propre église, sa secte dont il serait le gourou. Il se demandait sous quelle forme il ferait ça, pourquoi ne pas se proclamer pape, Richard 1er, ça sonnait bien… Il était persuadé qu’une telle décision ne choquerait pas ses fidèles. Ceux-ci étaient pour la plupart très traditionalistes. Aussi prit-il la décision de faire des homélies très droitières et de célébrer la messe en latin. Ce fut fort apprécié, sauf dans le village où un nouveau sujet de discorde était encore né.
Et puis un jour la télévision voulut réaliser un reportage ! Pour Richard, c’était prématuré, il refusa, mais ces gens-là sont teigneux, ils lui promirent qu’il ne serait pas filmé. En fait, il le fut, moins d’une minute, mais il le fut… Et les ennuis commencèrent :
Ce jour-là, Richard Lange sortait de l’église et se dirigeait vers sa voiture, quand Hervé M… ou du moins celui qui se faisait appeler par ce nom, l’aborda :
– Mon père, il faut que je vous parle !
– Désolé, j’ai un rendez-vous urgent !
– Eh bien, permettez-moi de monter dans votre voiture, je vais vous expliquer tout ça !
– Je suis désolé, téléphonez moi, on essaiera de prendre rendez-vous.
– Et si je sors ma carte de police, vous allez conserver la même attitude ?
Richard tomba dans le piège et rebroussa chemin jusqu’à la sacristie où il fit asseoir son visiteur
– Rassurez-vous ! Ce n’est pas le policier que vous avez en face de vous mais l’homme. Je suis chrétien, traditionaliste, mais je ne crois pas aux miracles, du moins j’estime qu’ils sont rarissimes. Donc vous avez un truc !
– Je n’ai aucun truc ! Et si vous êtes simplement venu pour me dire ça, on va stopper là cet entretien.
– Mais non, j’ai plein de choses à vous dire, je suis le président d’un petit groupe qui partage vos idées. Nous pourrions nous apporter beaucoup mutuellement. J’ai eu l’occasion de m’entretenir avec votre évêque, il ne voit pas toute cette agitation d’un très bon œil, vous ne pourrez pas continuer éternellement à dire vos messes ici…
– Je sais ce que je fais…
– Vous n’y arriverez pas seul, prêcher hors de l’église n’est pas si simple, il existe maintenant des lois antisectes, qu’un juge borné peut très bien interpréter à sa sauce. Il vous faudra des complicités dans le monde politique, des contacts avec des juristes, la gendarmerie… Vous n’avez pas tout cela, nous si !
– Désolé, je ne m’associe avec personne !
– Un jour ou l’autre votre trucage sera découvert, vous ferez quoi à ce moment-là ? Avec nous, vous ne risquerez plus rien !
Richard Lange eut alors l’idée de recadrer la conversation
– Je vais vous dire une chose ! Il n’y a aucun trucage. Nous sommes en présence de quelque chose qui nous dépasse. Et si je me suis grâce à Dieu retrouvé dépositaire de cette statuette, ce n’est pas pour que je m’associe avec des personnes que je n’ai pas l’honneur de connaître ? Déclama-t-il
– Si ce n’est pas vous, c’est quelqu’un qui vous la truque à votre insu !
– Je vous répète qu’il n’y a pas de trucage !
– Cela vous rendrait peut être service que je jette un coup d’œil ?
– Je vous autorise à le faire en espérant qu’après vous allez me foutre la paix….
Monsieur Hervé n’attendait que ça ! Sûr de son fait, il sortit de sa sacoche un fin fil de cuivre et entreprit d’essayer de l’introduire aux coins des yeux de la statuette. Un quart d’heure après, sa superbe était quelque peu perdue, il ne comprenait pas qu’une statue qu’il avait vu pleurer dimanche dernier ne possède pas un orifice lui permettant de le faire.
– Alors, vous voyez bien ! Ironisa Richard
– Il doit y avoir un truc, je vous demande encore cinq minutes et après, je vous débarrasse le plancher !
En fait de cinq minutes, Monsieur Hervé fit durer l’opération une bonne demi-heure, il prit des clichés en haute résolution qu’il transféra ensuite sur son ordinateur portable ! Bien évidemment il ne trouva rien !
– Bon, ça commence à bien faire… je vous reconduis vers la sortie ?
– Attendez, je n’ai pas regardé le socle.
– C’est fini, j’ai dit !
– Je n’en démords pas, il y a forcément un truc, on est en train de se faire abuser. Après tout Uri Geller avait bien abusé de grands scientifiques en tordant des cuillères, on a fini par le démasquer, je vais revenir avec un spécialiste, il trouvera bien lui !
– Certainement pas, cette statuette est à moi, elle n’est pas à la disposition de tous les Sherlock de la planète ! Allez au diable !
– En voilà une drôle d’expression dans la bouche d’un homme d’église !
– Merde !
Il faudrait que Richard se méfie, la solution était trouvable, il suffisait d’y penser ! Moins il y aurait de personnes qui s’approcheraient de la statuette, plus il serait tranquille.
– Je vous recontacterai, ma proposition est toujours valable ! Lança Monsieur Hervé avant de disparaître.
Mais il y eut beaucoup plus grave.
Cela commença un lundi par une très courte lettre de menaces imprimée par ordinateur :
« Tu dégages avant dimanche avec ta statue, sinon il va t’arriver des bricoles. »
Ce n’était pas timbré, quelqu’un l’avait donc placé directement dans la boite aux lettres de la paroisse. Il était conscient de l’hostilité qu’il rencontrait chez une partie des villageois, mais que ça puisse prendre un caractère aussi haineux le dépassait… Mais il ne s’inquiéta pas outre mesure… malgré tout par précaution le lendemain, il emporta sur lui un revolver acheté autrefois au marché aux puces, mais il n’y eut pas de nouveau message ce mardi… par contre le mercredi, Richard devint vert de peur en lisant la nouvelle missive du corbeau.
« On t’avait pourtant dit qu’on ne voulait plus entendre parler de toi ! La dernière fois c’était les jambes, la prochaine fois ce sera la tête ! »
L’horreur ! L’horreur absolue ! Cela voulait dire que le corbeau n’était pas un farfelu du village, mais la brute épaisse qui l’avait envoyé à l’hôpital il y avait plus d’un an maintenant. Et comme l’enveloppe n’était pas timbrée, cela voulait dire que le tueur était déjà sur les lieux ! Cette fois il fallait prendre une décision… et à part prendre la poudre d’escampette, il ne voyait pas bien ce qu’il pouvait faire…
Il se sentait las. L’impression d’un immense gâchis, toutes ces années de séminaire, les obligations paroissiales, les réunions épiscopales, les trucs et les machins… tout cela pour rien… enfin pas grand-chose, l’argent gagné avait été dépensé trop rapidement, il n’en restait pas tant que ça… et puis que faire après ? Son avenir lui paraissait soudain sombre, sombre… très sombre… horriblement sombre. Il quitta l’église en fin d’après-midi et prit la route de Clermont, sans trop savoir comment il allait passer la soirée, sans doute demain reviendrait-il une dernière fois à l’église embarquer les quelques affaires personnelles qui y restaient ainsi que les deux statuettes…
Il remarqua qu’une Fiat Punto bleue le suivait… il en distinguait mal le chauffeur dans le rétroviseur mais il lui semblait que cette corpulence ne lui était pas inconnue. Il s’arrêta sur le bas-côté. La voiture le doubla et s’arrêta 400 mètres plus loin. Il eut le temps au passage se reconnaître nettement son conducteur, cette fois-ci ! Et maintenant, non seulement il le suivait, mais il le narguait… Que faire ?
Et soudain il eut une idée, il redémarra, doubla la Fiat qui reprit sa course, puis quelques kilomètres plus loin, tourna à droite, là où la route filait vers la montagne. Il stoppa son véhicule à un endroit où se situait un impressionnant précipice. Puis le cœur battant, mesurant le risque énorme qu’il prenait, il attendit que son poursuivant s’arrête à son tour, puis sortit du véhicule. Le tueur descendit à son tour, et sans hésiter une seconde se dirigea vers Richard. Il n’était pas armé, mais arborait un sourire qui n’avait rien de sympathique.
Alors Richard tira ! Le mastodonte, atteint en pleine poitrine mourut sur le coup. Il ne restait plus qu’à balancer le corps dans le précipice, et la Fiat avec… Il accomplit cette tâche, mort de trouille à l’idée qu’une autre voiture survienne. Il eut malgré tout le réflexe de subtiliser les papiers du cadavre, estimant que cela pourrait retarder son éventuelle identification. Puis il poursuivit sa route, se refusant à faire demi-tour et accomplissant un invraisemblable détour pour parvenir jusqu’à Clermont. Une fois chez lui, les nerfs tombèrent. On ne devient pas impunément un assassin, même en cas de légitime défense… Il était clair à ce moment-là que le commanditaire était l’horrible et inquiétant Monseigneur Dujardin… Que fera ce dernier quand il constatera que son tueur ne réapparaissait pas… Il en enverrait un autre… Il faudrait donc qu’il parte… Richard était seulement un tout petit peu moins pressé…
Par contre quand il reconnut, malgré ses lunettes noires, Marie-France à la messe, non pas le dimanche suivant mais celui d’après, il se mit à gamberger. Que faisait-elle là ? Sans doute l’avait-elle, elle aussi reconnu à la télévision, mais si elle avait voulu le contacter elle l’aurait fait… donc ses intentions ne pouvaient être amicales. Et puis il se dit que Dujardin ne pouvait se faire le commanditaire d’un meurtre, l’empêcher de prêcher, oui, le tuer non… Par contre une femme se livrant à un chantage avec des photos, peut se sentir en danger et péter les plombs.
« Cette fille est folle, se dit-il, elle a eu peur de moi, je lui ai expliqué que je ne le lui en voulais pas, mais manifestement elle n’a pas eu confiance, c’est donc elle qui m’a envoyé la brute me casser les jambes, puis elle a regretté son geste et a essayé de m’amadouer. Puis quand j’ai disparu, elle a eu peur que je décide un jour de me venger, elle ne m’avait plus sous la main et cela lui était insupportable, elle a essayé de me retrouver mais en vain, puis il y a eu l’émission… et maintenant elle est là… »
Alors il se dit qu’il ne s’en sortira pas, mais qu’il ne se fera pas tirer comme un lapin. Quand il s’aperçoit que Marie-France le file, il essaie de l’entraîner dans le petit chemin dans lequel il se change… mais ça ne marche pas… Alors quand elle s’approche, l’air de rien, pour lire le digicode, il prend tout son temps, espérant la piéger, elle et sa complice dans son appartement… Et ça ne marche pas non plus… et puis l’hôtel, l’hôtel où il était à sa merci, mais où elle l’a laissé en vie, pour ensuite aller s’enfermer dans une chambre louée au même étage avant que lui-même y arrive… ce qui remet tout en question…
Champagne(s)
– Tu vas faire quoi, maintenant ? Demanda Marie-France.
– Laisser tomber tout ça, le tueur était donc bien à la solde de Dujardin, je ne comprends pas qu’il s’acharne comme ça contre moi !
– Il ne souhaite pas qu’on fasse le rapprochement entre un faux faiseur de miracles et leur ancien prédicateur.
– De là à aller jusqu’au meurtre…
– Qui te dit qu’il voulait te tuer ? Il existe des coups qui paralysent à vie, et la police, dans ces cas-là est beaucoup moins zélée…
– Charmant… de toute façon je ne peux pas rester là… dommage ça marchait bien…
– Ça se serait écroulé de toute façon, un jour ou l’autre quelqu’un aurait eu l’idée qu’il y avait deux statuettes, on avait bien trouvé, nous… Répondit Marie-France
– Vous aviez trouvé ? Mais pourquoi cherchiez-vous à savoir ça ?
– Je ne cherchais rien du tout, c’est mademoiselle qui cherchait à savoir.
Béatrice lui expliqua sommairement l’objet de sa mission…
– Et vous pouvez me le décrire, le type qui vous a demandé ce travail ?
– Oui, mais il n’y a peut-être pas urgence…
– J’espère qu’on pourra en reparler, mais maintenant Marie-France, je pourrais peut-être savoir pourquoi tu voulais me revoir !
– Parce que tu es beau, parce que tu m’a toujours fasciné, parce que j’ai regretté ton brusque départ… et si je ne suis pas venue te voir tout de suite quand j’ai débarqué ici, c’est parce que j’avais peur de te dire des choses trop définitives, c’est pour ça que j’ai attendu, c’est pour ça que j’ai demandé à Mademoiselle de m’accompagner…
– Pardon ?
– Je ne voulais pas être seule devant toi pour te dire que je t’aime !
– Non ! S’exclama Richard.
– Comment, « non » ? Tu ne me crois pas ?
– Je… je ne sais pas…
– Ne t’inquiètes pas, je ne te demande aucune réciprocité, j’aurais simplement aimé qu’on se revoit en amis, qu’on aille au restaurant de temps en temps, qu’on joue à la domination…
– Je suis le roi des cons ! Admit Richard, j’avais le bonheur à la portée de ma main et je suis venu ici chercher du fric qui ne m’apporte rien et des emmerdes…
– Tu serais d’accord pour qu’on fête nos retrouvailles ?
– Bien sûr !
– Garçon ! Faites nous monter du champagne, le meilleur, allez viens Béatrice, tu m’avais promis de ne pas me laisser en tête à tête avec ce brigand… et dis à Martinov de nous rejoindre…
– Béatrice, il faut partir, tu es en danger… Intervient alors celui-ci.
– Je ne crois pas, non ! Répondit cette dernière, tout est clair désormais, viens, mon petit professeur, on va pouvoir répondre à toutes tes questions !
Dans la chambre, Martinov attaqua de suite :
– Je ne sais pas ce que vous avez raconté à mon associée, mais je ne crois pas que vous êtes journaliste !
– Bingo ! Les raisons de ma présence ici sont en effet personnelles, j’ai tout raconté à Béatrice !
– Vous aviez une raison personnelle de vous intéresser à la statuette ? Feignit de s’étonner le professeur !
– Non, mais j’avais une raison personnelle de m’intéresser à Richard, tenez je ne vous ai pas présenté, Monsieur Richard Lange, Monsieur Martinov… euh, je ne connais pas votre prénom
– André… Mais Béatrice, écoute moi tout de même une minute, j’ai obtenu des renseignements sur ce prétendu Monsieur Hervé, c’est un type louche, dangereux… nous n’avons aucun intérêt à nous éterniser sur cette affaire, il faut juste que nous parlions ensemble de la façon de lui présenter le rapport final…
– Mais… Tu n’as aucune raison de t’inquiéter, l’enquête est finie, Monsieur Lange nous a tout raconté, et pour le reste nous verrons ça quand nous serons tous les deux…
Martinov allait répondre quelque chose quand le garçon arriva avec le seau à champagne…
– Laissez, on va se servir… mais une bouteille, ce ne sera pas suffisant, apportez une autre ! Lui demanda Marie-France.
Elle leva son verre, toute joyeuse, suivie de Lange plutôt ému, de Béatrice amusée, et enfin de Martinov plutôt perdu…
– A… à nous… finit-elle par dire !
Ils échangèrent quelques banalités en attendant la seconde bouteille. Quand celle-ci fut montée, Marie-France se lâcha :
– Alors Béatrice, ça va mieux ? Ça fait du bien le champagne…
– Arrête, je ne te dis pas la trouille que j’ai eue ! Je me suis même pissé dessus !
– Tu m’as pas dit que tu n’étais plus fâchée ?
– Je ne suis plus fâchée !
– Alors fais-moi un bisou !
Et là devant les deux hommes subjugués, Béatrice et Marie-France s’échangèrent un long baiser baveux.
– Ben quoi on, s’aime ! Déclara la dernière…. Hummm c’est vrai qu’on n’est pas très discrètes, c’est un fantasme de mecs ça, de voir deux nanas se faire des trucs… Ça t’excite, hein, Richard….
– Excité, c’est peut-être pas le mot, mais c’était très joli ! Répondit-il
Marie-France se leva, souffla un mot dans l’oreille de Béatrice et se dirigeant vers le curé, lui mit la main à la braguette !
– A part ça, tu n’es pas excité, peut-être. Tu bandes comme un cheval !
Martinov se sentait un peu gêné, mais Béatrice, coquine vint s’asseoir sur ses genoux…
– Alors comme ça, mon petit professeur s’inquiétait pour sa petite Béatrice, ça mérite bien un bisou ça aussi… lui dit-elle en posant chastement ses lèvres sur sa joue…
– Ben, oui ! On se refait pas !
– Et toi, ça t’a fait bander notre french kiss ?
– Béatrice !
– Permets que je vérifie…
– Béatrice, du calme !
– Laisse toi faire, mon petit professeur, j’ai vécu de grosses émotions, pour me calmer je crois que du champagne et du sexe, ça sera très bien… Dit-elle alors que sa main par-dessus le pantalon faisait grossir son pénis.
Marie-France, avait de son côté entrepris de sortir enfin celui de Richard, qui protesta par principe, mais se laissa faire quand il vit ce qui se passait à quelques mètres de lui…
– Alors, il n’a pas une belle bite, mon Richard ? Lança-t-elle à la cantonade.
– C’est vrai qu’elle est belle ! Constata Béatrice qui de son côté jouait avec celle du professeur à présent hors de sa braguette. Je peux toucher ?
– Ben, non, il éjacule trop vite… Je suis sûre que tu n’as pas pris tes petites pilules et j’en ai pas sur moi…
– Des pilules pour quoi faire ? Des pilules pour bander ? demanda Béa.
– Ben ouais !
– J’ai peut-être un produit qui pourrait remplacer ! Intervint Martinov, j’en ai toujours un flacon dans ma sacoche, attendez…
– C’est quoi ?
– C’est du Lapin Dur (voir l’épisode professeur Martinov et le lapin dur). C’est plus efficace que le viagra. Faut juste attendre une dizaine de minutes.
Richard avala une gorgé du remède miracle.
– Pauvre Richard, condamné à ne rien faire pendant dix minutes, tu vas nous regarder alors… à moins que… Et si tu suçais le professeur ? Suggéra Marie-France.
– Mais moi je ne veux pas ! Protesta ce dernier.
– Ben pourquoi ? Il ne va pas te faire mal, et puis ça m’excite, moi de voir deux hommes ensemble ! Intervint Béatrice.
– Autrement dit, tu veux que je dise oui, rien que pour te faire plaisir ! Répondit Martinov
– Ben oui !
– Alors d’accord, mais je le fais uniquement pour te faire plaisir… Monsieur si vous voulez bien me sucer, j’y consentirais bien volontiers.
Richard, encouragé du regard par Marie-France, approcha donc la verge du professeur et entreprit de l’emboucher immédiatement. Quelques coups de langue sur la hampe, d’autres sur les bourses, puis sur le gland, puis de nouveau une série d’aspirations à pleine bouche. Martinov était aux anges.
– Alors il suce comment ? Demanda Béa
– Divinement
– Mieux que moi ?
– C’est différent !
– Bon à mon tour ! Intervint Marie-France, je vais te montrer ce que sait faire une pro !
– Une pro ?
– Ben, oui, une pro !
Richard quitta à regret sa fellation, remplacé donc par Marie-France. Béa entreprit de le consoler de ce contre temps.
– Et si tu venais me lécher le minou, ça m’excite tout ça !
Et tandis que le curé s’installait entre les cuisses de la jeune chimiste, Marie-France s’était emparée de la bite de Martinov, où après quelques circonvolutions d’usage, elle plaça ses doigts à la racine de la verge, appuya légèrement tandis que sa langue allait du frein au méat en un ballet diabolique. Quand les signes de la jouissance se firent sentir elle emboucha rapidement la bite, lui fit faire deux ou trois allers et retours avant d’éloigner ses lèvres, ne souhaitant pas recevoir du sperme dans la bouche !
– Alors ?
– Quelle maîtrise, mes félicitations, madame !
– Que voulez-vous, c’est mon métier… et d’ailleurs non ce n’est pas mon métier, je ne fais jamais ça pendant le travail… mais disons que je dois avoir des dispositions.
– Vous travaillez dans le sexe ?
– Bingo ! Ah, je crois que je vais remplacer Richard, il n’arrive pas à faire jouir votre assistante.
Marie-France, décidemment en pleine forme réussit à faire jouir Béa en trois minutes chrono, tandis que les deux hommes se régalaient en silence du spectacle. La potion magique commençait à faire son effet et la bite du curé arborait désormais une fière érection.
– Hum, pas mal votre produit ! Vous avez vu cette belle bite que ça lui fait ! Commenta Marie-France., ça vous tente ?
– Pardon ?
– Vous aimeriez bien la sucer ?
– Non, non !
– Allez, mon petit professeur, c’est la fête, suce la bite du monsieur ! Intervint Béa.
– Béa tu m’embêtes !
– Juste un peu, histoire d’essayer !
– Bon alors juste un peu !
Martinov, qui n’avait pas pratiqué ce genre de choses depuis fort longtemps, engloutit le sexe de Richard après avoir pris un peu de potion pour se donner du courage, et commença à le sucer, se débrouillant comme il le pouvait et trouvant finalement la chose aussi agréable qu’excitante. Il sentit que derrière on lui tripotait le cul de façon très osée, aussi, abandonna t’il sa fellation un instant, pour se retourner et faire semblant de protester.
– M’enfin !
– Laissez-vous faire professeur, tous les hommes adorent ça… du moins quand c’est bien fait… lui lança alors Marie-France avec un adorable sourire.
Ne sachant que répondre, il la laissa faire et reprit son suçage de bite, alors que sa propre excitation remontait à grande vitesse.
– Ça te plait ce que je te fais ? Demanda la doigteuse.
– Humpfoui ! répondit-il sans lâcher sa proie.
– Si on leur demandait de s’enculer ? Proposa alors Marie-France à Béa.
– Hummm, pourquoi pas, s’ils sont d’accord !
– Moi, ça ne me dérange pas ! Précisa Richard.
Martinov, toujours la bouche pleine, ne répondit pas… au point où il en était-il s’en fichait mais n’avait pas envie de le dire. Toujours est-il que le curé voulant passer à autre chose s’éloigna de son fellateur.
– Alors elle est bonne sa bite ? Demanda Béa.
– Ça change ! Ce n’est pas désagréable.
– On fait quoi maintenant ? Reprit la blonde chimiste.
– C’est vous qui décidez ! Répondit le professeur, sans trop réfléchir.
– T’aimerais qu’il te la foute dans le cul ? Intervint Marie-France.
– Au point où j’en suis ! Soyons fous !
– Ben alors Richard ! Qu’est-ce que tu attends, mets-toi une capote et occupe-toi de ce gentil monsieur, il en meurt d’envie.
– Mais je ne suis pas actif ! Protesta Richard.
– Avec la bandaison que tu te paies, on va faire une exception : Allez zou !
Alors Richard entreprit de sodomiser le professeur. L’affaire ne dura pas très longtemps, on inversa ensuite les rôles…. Les deux hommes totalement épuisés ne tardèrent pas à s’affaler l’un sur le lit, l’autre sur le fauteuil tandis que ces dames complètement émoustillées se lançaient dans un soixante-neuf de folie… qu’elles ne menèrent pas à terme. En effet Marie-France se dégagea assez vite :
– Attends je reviens j’ai trop soif ! Merde il n’y plus de champagne ! On va en commander deux nouvelles bouteilles et aussi de l’eau,
– Moi aussi j’ai une de ces soifs ! Intervint Richard.
– C’est normal, expliqua Béatrice, c’est le produit du professeur, c’est très efficace, mais il y a un effet secondaire, c’est que ça déshydrate.
– Bon, j’appelle la réception.
– Attends, je m’en occupe ! Proposa Béatrice. Allo la réception, pourriez-vous nous monter deux nouvelles bouteilles de champagne… oui le même et puis quatre bouteilles d’huiles d’olive… comment ça vous n’en n’avez pas, vous faites bien restaurant non ? Bon alors on vous attend.
Béatrice encore sous l’effet de l’aphrodisiaque, revint vers Marie-France :
– On reprend !
– Attends qu’on nous livre les bouteilles, mais c’est pour quoi faire l’huile d’olive ?
– Ah, ah, c’est une surprise… bon alors on attend, Dis-moi mon petit professeur, ça t’a plu de te faire enculer par Richard ?
– On dit « sodomiser » précisa ce dernier
– Tu en voudrais encore ? Insista la jeune chimiste.
– Pourquoi pas ?
Richard à ces mots, se présenta de nouveau devant le professeur qui sans hésiter cette fois une seconde la remit sans sa bouche. On sonne ! C’est Béatrice qui ouvre au garçon d’étage.
– On ne peut que vous proposer que trois bouteilles d’huile… mais que… que…
Le pauvre garçon est sur le point de s’étrangler, il en a vu des trucs dans les hôtels, mais là, non seulement il y a deux nanas à poil, mais dans le fond là-bas il y a deux mecs qui se sucent…
– Vous pouvez vous joindre à nous ! Propose Marie-France.
– Non merci, j’ai du travail !
– Juste une petite pipe ! Insiste la dominatrice en lui tâtant la braguette.
– Non laissez-moi ! Finit-il par dire en s’enfuyant.
– Dommage, il était mignon… Bon on se boit une bouteille, mais alors on fait quoi avec l’huile ?
Ils trinquèrent et,- soif oblige – sifflèrent la bouteille en moins de temps qu’il en faut pour le dire. Puis Béatrice expliqua :
– Tant que le produit agit, on risque de déshydrater, on va donc se badigeonner tous avec l’huile et on va aller continuer nos galipettes dans la salle de bain.
– Mais c’est trop petit !
– On va se débrouiller !
La salle de bain devint alors le théâtre de poche d’une incroyable orgie où nos quatre protagonistes essayèrent toutes les combinaisons possibles et imaginables, occupant à tour de rôle, la baignoire et le carrelage par deux ou par trois, les corps glissant sans arrêt les uns contre les autres, les cris de jouissance alternant avec les fous rires. Quant à Martinov, il fut absolument ravi de faire l’amour avec Marie-France !
– Profites en aujourd’hui c’est gratuit ! Plaisanta-t-elle !
– Pourquoi, sinon c’est payant ?
– Bien sûr, mais je te laisserai ma carte, il y a longtemps que je n’ai pas baisé avec un barbu il parait que ça porte bonheur. Attends, retire-toi quelques secondes, j’ai trop envie de pisser, je ne voudrais pas faire sur toi !
– Pourquoi ? Ça ne me dérange pas !
– Ben si tu aimes, tu vas avoir ta dose ! Prêt ?
– Prêt !
Alors Marie-France lâcha un jet qui parût intarissable, mais les autres par effet de mimétisme ne tardèrent pas à l’imiter, dans une ambiance de folie où tout le monde pissait sur tout le monde, et repissait encore… laissant dans l’étroite salle de bains une odeur étrange, une de plus… L’effet de l’aphrodisiaque finit par s’estomper. Tout ce petit monde après avoir nettoyé tout cela, s’être douché puis rhabillé décida de descendre au restaurant de l’hôtel pour un repas d’adieu.
– T’es d’accord mon petit professeur ? Lui demanda Béa.
– J’ai un peu mal au cul !
– Je te demande si tu es d’accord pour qu’on dîne tous ensemble, tu deviens sourd ?
– Oui, oui, bien sûr, mais pourquoi tu ne me crois pas quand je te dis que j’ai mal au cul ?
– Mais si je te crois, allez viens…
Monseigneur Dujardin
La « Fraternité du livre sacré » de Monseigneur Dujardin ne s’était jamais vraiment remise de l’affaire Ricardo Angelo, les dirigeants s’étaient déchirés sur le fait de décider si le meeting parisien se tiendrait quand même. Il se tint, ce fut un fiasco, le prédicateur remplaçant ne tint pas la route. L’enthousiasme du flot de nouveaux adhérents retomba aussi vite qu’un soufflé, et l’organisation se réduisit peu à peu à une peau de chagrin.
La haine de l’évêque envers Richard ne s’était jamais dissipée et quand on lui fit part de son apparition à la télé en lui montrant l’enregistrement il faillit faire une crise d’apoplexie. Il téléphona aussitôt à cet inquiétant homme de main…
Mais voilà qu’aujourd’hui une journaliste avait la bonne idée de s’intéresser à sa confrérie : La magnifique créature qui était devant Monseigneur Dujardin le mettait mal à l’aise. Trop belle, elle éveillait chez le vieux prêtre des sensations contradictoires. Il était d’ordinaire misogyne et sans doute homosexuel refoulé, mais celle-ci arrivait à réveiller de vieux fantasmes qu’il aurait bien voulu voir rester enfouis. D’abord méfiant, l’évêque baissa sa garde quand il crut comprendre que la journaliste partageait plus ou moins certaines de ses opinions En fait, Marie-France attendait le moment propice, elle n’avait aucun plan, elle improvisait, elle adorait, ça improviser. Après une longue réponse de l’évêque, elle attaque :
– C’est très curieux ce vous me dites parce que j’ai entendu exactement le même discours il y a moins d’une semaine…
Pourvu qu’il amorce… Pria Marie-France.
Il amorça !
– Ah oui ? Je peux vous demander où ?
– Oh ! Un curé en Auvergne qui prétend faire des miracles avec une statuette…
La montée d’adrénaline fit brusquement rougir le visage de Dujardin
– Vous l’avez vu cette semaine ?
– Oui !
– Et il est toujours là, avec sa statuette ?
– Oui ! Vous le connaissez ? On dirait que ça vous contrarie !
– Ce type est un escroc !
« Ça mord, ça mord même très dur ! » Pensa Marie-France, amusée. Dujardin ne l’écoutait plus. Il ne comprenait plus rien. Voilà qui expliquait le silence de son « tueur », il s’était passé quelque chose, mais quoi ? Sa mission était pourtant simpliste : il fallait qu’il intimide le curé, qu’il le rende vert de peur et le menace pour l’obliger à partir, et par la même occasion, il fallait détruire la statuette. Il avait pour instruction précise de ne pas attenter physiquement au prêtre, cela afin d’éviter les risques de dépôt de plainte, et surtout pour que ce dernier n’y trouve pas prétexte pour jouer les martyrs. Il avait donc échoué ! Voilà qui expliquait le silence de l’homme de main. Mais que s’était-il passé ? Comment un professionnel aguerri pouvait-il rater une mission aussi facile ?
– Ce type a fait partie de notre organisation, reprit Dujardin, il en a été un personnage important, une sorte de porte-parole. On l’a viré, c’était un pervers infiltré pour nous ridiculiser.
– Vraiment ? Feint de s’étonner Marie-France, qui était bien placée pour connaître la véritable version.
– Si par malheur, les médias s’intéressaient trop à lui, son passé chez nous resurgirait, ce serait une catastrophe pour notre organisation.
– Et vous avez les moyens de faire quelque chose ?
Dujardin réfléchit quelques secondes : il fallait qu’il se rende sur place, casser la statuette lui-même, et éventuellement découvrir pourquoi son homme de main n’avait pas su le faire.
– Je pense qu’il faut considérer comme une œuvre d’exorcisme, le fait de détruire cette statue. Seriez-vous d’accord pour m’aider ?
– Vous aider à casser la statue ? Il ne faut peut-être pas exagérer, répondit-elle presque par réflexe et en le regrettant aussitôt
– Non, rassurez-vous ! Je n’aurais pas cette outrecuidance, mais il m’intéresserait simplement de savoir si certaines heures vous semblent plus propices pour pénétrer dans l’église.
Et le plan germa instantanément dans l’esprit de la jeune femme.
– L’église est souvent fermée, mais je peux la faire ouvrir une heure rien que pour vous !
– Comment pouvez-vous faire une chose pareille ?
– Je suis journaliste, j’ai mes méthodes… Et mes secrets.
– Convenons d’une date, alors !
– Nous sommes lundi, disons dans quinze jours !
– Ce n’est pas possible avant ?
– Je crains que non !
Le surlendemain Marie-France était à Cardillac, à 6 heures et quart revêtue d’un déguisement d’ouvrier, elle entra dans l’église. Elle attendit sagement que l’homme venu prier veuille bien s’en aller. Puis entreprit de casser quelques pauvres statuettes de plâtre et de déchirer aux ciseaux quelques étoles. Elle sortit ensuite et rejoignit sa voiture dont la plaque avait été maquillée. Elle prévint ensuite la presse, puis l’évêché qui porta plainte. La gendarmerie se déplaça mais ne put que constater que le vandale n’avait saccagé que la moitié des objets.
La semaine suivante, elle envoya une lettre anonyme à la gendarmerie et au journal local, leur indiquant l’heure et la date à laquelle le malfaiteur allait recommencer.
Ce jour-là, deux gendarmes, un journaliste et un photographe étaient tapis dans un coin d’ombre de l’église. Dujardin entra, eut tôt fait de repérer la vierge miraculeuse, franchit la barrière de fer forgé, renversa la statuette qui se brisa en plusieurs morceaux. L’instant d’après il était menotté et embarqué sans ménagement sous les flashs du photographe.
Personne ne comprit rien aux explications de Jérôme Dujardin à ce point que les gendarmes lui offrirent une consultation en psychiatrie. L’homme de l’art conclut à un état de névrose paranoïaque, mais ne le fit pas interner. C’était de toute façon inutile, les coupures de presse envoyées à son staff eurent pour effet d’y mettre une joyeuse pagaille… dont son organisation ne se remit jamais.
Monsieur Hervé
Celui qui se faisait appeler Monsieur Hervé était un croyant sincère. Son petit groupe est issu d’une ancienne scission de la Fraternité du livre sacré, de Monseigneur Dujardin, elle-même issue des innombrables scissions de la fraternité Saint Pie X de l’ineffable Monseigneur Lefebvre.
Hervé était jaloux de tous ces gourous qui attiraient des foules entières en racontant n’importe quoi ! Comme il aurait voulu être comme eux, doté d’un don pour l’organisation, il monta plusieurs fois des associations pour lesquelles il trouva de riches mécènes. Mais à chaque fois après des débuts prometteurs l’affaire tombait à l’eau. Hervé n’avait aucun charisme et au lieu de stigmatiser les foules, il les endormait. Meurtri, il abandonnait ses projets, mais n’abandonnait pas la caisse, ce qui lui valut quelques procès pour escroquerie. Une fois, il tenta de convaincre un plaignant de laisser tomber, l’affaire se termina par une escalade de voies de faits, de violences physiques et de dégradations matérielles. Il fit donc quelques mois de prison. Il eut ainsi le temps de réfléchir. Il en conclut que puisqu’il n’avait aucun don de prédicateur, il fallait donc qu’il en trouve un avec qui s’associer.
Richard Lange lui avait paru un bon choix possible, l’homme avait du charisme, remuait les foules, avait des mots justes, il lui avait proposé une association qu’il avait refusée. Pas bien grave, l’essentiel étant déjà de savoir comment fonctionnait sa statuette. S’il s’avérait que le trucage était grossier, il ne donnerait pas suite. Il avait donc examiné sans rien déceler, c’était bon signe, mais il n’avait rien d’un spécialiste, ce qu’il fallait c’est en mettre un sur le coup en espérant qu’on ne trouve rien. Peu lui importait qu’il y ait trucage ou pas, ce qu’il lui importait c’est qu’il ne soit pas décelable, les miracles, du moins les modernes, il n’y croyait pas trop. Mais dans sa conception de la religion qui était très prosélyte, la fin justifiait les moyens.
Aussi quand Martinov lui annonça que la statuette était en double, surpris de cette révélation inattendue, il s’énerva, cette réponse ne lui convenait pas :
– Comment pouvez-vous en être sûr ?
Martinov agacé, lui expliqua…
– Mais s’il y en a deux, la vraie statue, vous ne l’avez donc pas approchée ? Reprit Hervé
– Impossible, il doit toujours l’avoir près de lui !
– Donc vous ne savez pas comment fonctionne la vraie ?
– Je suppose qu’il s’agit d’une supercherie classique…
– Monsieur Martinov, je ne vous paie pas pour des suppositions…
– Je crois bien que vous m’aviez spécifié que je serais payé dans tous les cas de figure…
– Ah oui ? Et bien faites-moi un procès ! Conclut-il en raccrochant.
Monsieur Hervé, mais pas mal de jours plus tard
Monsieur Hervé n’en croyait ni ses yeux ni ses oreilles. Il fit répéter sa phrase à cette espèce de vamp qui venait de sonner à porte.
– Je fais signer une pétition pour la canonisation du pape Pie XII, répéta Marie-France.
– Je veux bien signer, mais je voudrais savoir quelle association est à l’origine de cette pétition.
Marie-France répéta sa leçon, et comme l’homme ne la faisait pas entrer, elle précisa :
– Ce n’est pas une simple signature, c’est une lettre personnelle qui sera adressée au Vatican avec un certain nombre de mots clés que vous pouvez choisir. Il est un peu difficile de faire ça sur le pas de la porte. Mais rassurez-vous ça ne dure que cinq minutes.
Il la fit donc entrer
– Je vous offre quelque chose à boire ?
– Si vous aviez du thé ?
– Je vais en faire !
Marie-France jubilait, de tous les plans qu’elle avait échafaudés, c’était le plus facile à exécuter qui était en train de se réaliser. Elle profita de l’absence de son hôte pour faire un bref inventaire visuel des objets exposés dans le salon. Le type semblait passionné d’art colonial, elle n’y connaissait pas grand-chose mais elle supposait que certaines pièces devaient valoir leur pesant d’euros !
Hervé revint avec un plateau sur lequel deux tasses déjà pleines avaient été disposées. Il constata alors qu’un bouton s’était libéré sur le corsage de sa visiteuse offrant une vue fort émoustillante sur l’échancrure de son soutien-gorge. Marie-France profita de cet instant de distraction pour dissimuler le sucre. Hervé, lui reprit ses esprits et s’amusa à lui poser des questions embarrassantes sur l’initiateur de cette prétendue pétition.
– Vous savez j’ai été embauchée pour faire signer ces lettres. Alors bien sûr je suis d’accord avec ce que je fais, mais je n’y connais pas grand-chose ! Finit-elle par répondre, pressentant que l’affaire allait être plus difficile que prévue. Voilà la lettre type, il vous suffit de la recopier, les phrases en rouge peuvent être remplacés par d’autres qui sont sur la liste…
Hervé ne fut pas dupe, ces documents qu’il connaissait avaient été imprimés d’après une page web. Il ne lui restait plus qu’à éconduire l’intruse avant qu’elle ne devienne envahissante.
– J’ai compris, je ne vais pas recopier tout ça maintenant, je suppose qu’il y a une adresse où envoyer tout ça… Tenez, c’est du vrai thé de Ceylan, je vais vous demander de le boire assez vite, j’ai des choses à faire ensuite.
– Si vous aviez un sucre ?
– Ah ? Je l’ai oublié ?
Trop facile ! Son hôte repart en cuisine, le petit cachet magique qu’elle avait préparé vint s’échouer dans la tasse de son hôte ! Quand ce dernier revint, montrant par là qu’on peut être con sans pour autant être idiot, il dit :
– C’est très habile de votre part de cibler vos clients, mais bon avec Internet ce n’est pas trop difficile, par contre je ne crois pas une minute à votre pétition, vous n’avez pas le physique de l’emploi. Vous êtes venue essayer de me vendre quelque chose. Je vais vous faire gagner du temps : je n’ai besoin de rien et vous n’êtes pas obligée de finir votre thé si vous ne l’appréciez pas.
– Pour apprécier Pie XII, il faudrait qu’une femme ait des moustaches et de l’acné ? Railla-t-elle.
– Non, pas du tout, vous finissez votre thé ou pas ?
– Je vais le finir, si vous me le permettez, laissez-moi cinq minutes et après, c’est promis je décampe.
Marie-France rageait, son plan pour réussir nécessitait qu’il ne la jette pas trop vite, et là elle était en train d’échouer… on ne peut pas réussir à tous les coups !
– Je suis désolée de vous avoir dérangé, vous savez je fais un drôle de métier ! Dit-elle, espérant gagner du temps.
– Ce n’est pas mon problème.
– Si vous saviez tout ce qu’il faut faire parfois pour vendre une encyclopédie.
– Finissez votre thé, je vous en prie.
– Vous m’aviez accordé cinq minutes, elles ne sont pas écoulées… mais bon, je bois. Vous savez, des fois je n’hésite pas à coucher avec le client pour faire affaire. Sur une encyclopédie à 1400 euros sur laquelle j’ai 13%, ça vaut le coup !
– Belle mentalité !
– Remarquez, avec vous ce n’aurait pas été une corvée !
C’était sa dernière bouée, si ça ratait, elle n’insisterait pas.
– Qu’est-ce que j’ai donc de spécial ?
– Rien, vous êtes mon genre d’homme.
– On va se dire au revoir mademoiselle, vos encyclopédies ne m’intéressent pas et vos turpitudes encore moins.
– Je le sais bien, mais on peut s’amuser une heure non ?
– Je crois que vous n’avez rien compris, j’ai à faire mademoiselle et maintenant je vous demande de dégager les lieux.
– Ce que vous avez à faire, vous le ferez après ! Répondit-elle en commençant à déboutonner son chemisier.
Les yeux de Monsieur Hervé s’exorbitent tels ceux du loup de Tex Avery, la tentation est trop forte, il se sent prêt d’y succomber, il va pour dire quelque chose, mais il se sent soudain très las, ses paupières s’alourdissent, il s’affaisse sur sa chaise, il ronfle déjà !
– Enfin ! Soupire Marie-France
Elle traîne péniblement le type jusque dans sa chambre, le déshabille et le couche. Elle lave ensuite les tasses de thé et repère l’endroit pour les ranger. Elle trouve ensuite un grand sac de voyage dans lequel elle entasse plusieurs objets de collection, puis disparaît. Dans quatre heures, le faux Monsieur Hervé se poserait plein de questions : pourquoi a-t-il été se coucher à cette heure-là, en oubliant de verrouiller sa porte d’entrée ? Il attribuera sans doute dans un premier temps le souvenir de cette représentante nymphomane à ses rêves avant de se rendre compte que quelques objets précieux se sont volatilisés.
Quelques jours après, Marie-France négocia son larcin pour un bon prix auprès d’un antiquaire belge qui était aussi l’un de ses clients.
Béa en guise d’épilogue
Ce matin, Béatrice ouvrit sa boite mail, elle ne connaissait pas ce correspondant, mais de voir ce message signé « Marie-France », la remplit de bonheur. Elle lut :
« Béatrice, j’ignore si nous nous reverrons, mais j’aimerais te dire comme le souvenir de notre rencontre est présent dans mon esprit à ce point que quand j’évoque ton image, le goût de tes lèvres parfume à nouveau ma bouche. Il m’insupportait de savoir que ce Monsieur Hervé n’avait pas honoré son contrat, je lui ai donc rendu une petite visite et j’ai su me montrer très persuasive. Cette somme est disponible, réponds moi par mail pour me dire comment te la faire parvenir. »
La jeune assistante du professeur Martinov, sauta alors sur son téléphone, et appela Marie-France.
– On peut se voir ce soir à 19 heures ! Proposa-t-elle
– 19 heures, c’est l’heure du restau ? On mange d’abord ou on mange après ?
– Coquine !
Maud Anne Amaro 2006/2008
Il est bien évident que tous les personnages et lieux de cette nouvelle sont fictifs à l’exception de la ville de Clermont (qui renseignement pris existe) ainsi que son évêque, qui n’a qu’un rôle très mineur dans cette affaire et qui je l’espère ne s’en offusquera pas...
Ce récit a eu l’honneur d’être 2ème prix de la meilleure nouvelle pour 2008
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