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Maudite robe de chambre !
par Jean-Seb
Pardon à toi, critique vénéré,
Toi que ce style que tu nommes tutu irrite tant !
Mais comment pourrais-je m'exprimer autrement ?
Moi qui ne peux dialoguer ?
Prisonnier du sort que l'on m'a jeté !
Je ne parle pas, mais je vois, je regarde, et je me souviens !
Mais personne ne le sait, ni se soucie du sort qui est le mien !
Je suis là pour le meilleur, mais aussi pour le pire !
Mais, rassurez-vous ! Ce pire je n'ai rien à en dire !
Mais au diable les rimes ! Ma poésie est dérisoire !
Comparé au bonheur de te sentir et de te voir !
Car te voilà déjà ! Je ne t'attendais pas si matin !
Ne va pas trop vite, ne soit pas si pressée !
Remplis mon esprit de souvenirs, de petits riens
Qui me feront patienter jusqu'au retour de tes pas !
Je te connais par cœur, mais je ne me lasse pas
C'est dans l'aurore que je te préfère.
Tu n'es pas encore habillée ! De quoi as-tu l'air ?
Parfois tu es nue ou comme aujourd'hui
Vêtue de cette robe de chambre que ne ferme qu'un vilain cordon.
Ce cordon que tu détache d'un mouvement grognon.
Et puis tu te livres à cette pantomime étrange
Que je connais si bien ! D'un geste brusque, tu lance le pan droit.
De cet insupportable vêtement rejoindre ton côté gauche.
Etant bien placé, je peux ainsi admirer ta longue jambe galbée
Et ta cuisse qui sans cesse invite la caresse.
Si tu voulais pivoter un petit peu, que je puisse mieux voir ?
Mieux voir quoi ? Je te laisse le choix !
Ta petite chatte, mais elle, je la verrais bien tout à l'heure ?
Alors plutôt tes fesses avant qu'à nouveau tu ne les caches !
Ça y est ! Tu t'assieds !
Tes jambes sont écartées !
Tu as l'air de penser à d'étranges choses !
Et voici le doux jet doré de ton petit pipi qui s'échappe de ton corps
Et qui vient tintinnabuler dans l'eau dormante.
Tu regardes ailleurs ! Attendant que se tarisse
Cette trop imprévisible source, où les fantasmes se nourrissent.
D'ordinaire à ce stade tu arraches un bout de mon ruban
Puis tu t'en essuie, et d'un geste machinal, le regarde !
Mais non, pas ce matin ! Je sais que tu mouilles.
Tu restes là, et tes doigts te fouillent
D'une main tu saisis le bout de ton sein que tu presse !
Sauvage ! Va !
Tu te recule un peu sur le siège, pour prendre mieux tes aises.
Tant mieux ! Je te vois bien mieux ainsi !
Ton dos se penche en arrière, tes paupières se ferment !
Tes cuisses tressautent, ton dos s'arque !
Un cri veut sortir de ta bouche, tu l'étouffe !
Il se change en soupir !
Et ça y est cette fois tu le prends ce ruban, tu en prends même trop.
Tu le déchire violemment, et tu t'essuie.
Tu as ce geste ensuite que tout le monde n'a pas,
Mais je l'ai déjà dit, de regarder,
Oui ! de regarder,
Oh juste l'espace d'un instant ce bout de papier
Maculée de tes intimes humidités.
Pour ensuite geste inutile, le froisser,
Et pour finir, geste fatal, le jeter,
Tu fais résonner le tonnerre de la chasse d'eau.
Je déteste ce vilain petit bruit.
Une dernière vision de ton corps !
Elle est bien partielle !
Maudite robe de chambre
De laquelle, en un geste nerveux, tu resserre le cordon
Maudite robe de chambre !
Qui ne me permet plus de voir !
Et tu sors !
Il me reste ton odeur !
Ta féminine fragrance qui se dissipera lentement.
Si un abruti ne vient pas asperger du déodorant !
Je peux reprendre ma lente méditation !
Peu de gens savent qu'un vulgaire distributeur de papier toilette
Peut abriter l'âme errante d'un voyeur impénitent
Que les enfers voulurent punir ainsi !
Mais qui y en fait y trouvait malgré tout son compte !
© Jean-Sébastien Tiroir (Novembre 2000)
monsieur_tiroir@hotmail.com
Première publication sur Vassilia, le 18/12/2000
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