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Professeur Martinov et la maison de Cendrillon par Maud-Anne Amaro
Préambule : cette histoire fait suite à « Professeur Martinov et le lapin dur » et à « Professeur Martinov et le mont de Vénus » mais peut se lire seule.
LUNDI
Nous retrouvons le professeur Andrej Martinov et sa charmante et blonde assistante Béatrice, dans la salle de restaurant d’un hôtel de voyageurs des environs de Besançon dans le Doubs !
Mais que font-ils là ces deux-là ? Me demanderez-vous ?
Oh, c’est très simple, vous savez que nos deux complices ont fait fortune (un peu, juste un peu !) en commercialisant le » lapin dur » produit aphrodisiaque découvert par hasard (voir ce récit). Mais ayant appris que l’usine chargée de sa fabrication ne respectait pas la posologie et lui substituait un mélange sans doute plus rentable pour elle mais à l’efficacité nulle pour les utilisateurs, Martinov fut donc, après avoir rompu avec ces indélicats, obligé de chercher ailleurs. Et cette petite usine dégotée par petite annonce et qui cherchait de l’ouvrage ferait parfaitement l’affaire. Le marché s’était conclu. Et voici donc nos deux héros en train de trinquer au succès de ce petit déplacement !
– Tu connaissais cette région ? Demande le professeur ?
– Non, pas du tout, c’est vraiment très joli !
– J’ai bien envie de m’y attarder deux ou trois jours, ça me ferait peut-être du bien de changer un peu d’air ! J’en ai marre d’avoir des douleurs partout !
– On peut rester deux trois jours, et on repartirait avant le week-end ? Suggéra Béatrice.
– Pourquoi pas ? Mais j’ai rien amené pour me changer !
– Ce n’est pas un problème, ça s’achète ce genre de choses… Remarque, je ne sais pas s’il y a grand-chose à voir dans le coin ?
– Il doit y avoir des belles balades à faire, non ?
– Alors, d’accord pour les balades, je vais me renseigner à la réception.
Béatrice se dirigea alors vers la caisse où officiait une imposante gérante. Martinov ne se lassait pas d’admirer les formes de son assistante, elle s’était vêtue aujourd’hui d’un pantalon jaune qui lui moulait joliment ses globes fessiers et il n’en perdait pas une miette. Devinant qu’il la regardait, elle se retourna brusquement et lui lança un petit sourire complice qui eut pour effet de le faire fondre. Martinov avait toujours été sentimental ! Il continua à l’observer pendant qu’elle s’éternisait à bavarder avec la patronne ! Que pouvaient-elles bien se raconter se demandait-il ?
Enfin elle revint !
– Ben alors ?
– Ça marche ! J’ai pris deux chambres jusqu’à jeudi et on pourra même prolonger si on a envie !
– On aurait pu prendre une chambre pour deux ? Lança Martinov, soudain égrillard.
– Mais non mon petit professeur, je t’aime bien, mais tu ronfles de trop ! Et puis de toute façon ça aurait été des lits jumeaux, tu n’aurais pas pu t’endormir dans mes bras !
– Cruelle !
– Mais non !
– Tu en as mis un temps à négocier ça ?
– La patronne est curieuse comme une pissotière, elle voulait, l’air de rien, absolument savoir ce qu’on fabriquait par ici, alors je lui ai dit qu’on était journalistes, qu’on était sur une drôle d’affaire et que je ne pouvais pas lui en dire plus, because le secret professionnel, elle n’a pas insisté !
– Sacrée Béatrice ! A la tienne !
– A la tienne mon petit professeur !
C’est à la fin du repas alors que Martinov dégustait une excellente crème brûlée que surgit un étrange personnage :
– Excusez-moi de vous déranger ! Je ne souhaite vous dire qu’un seul mot !
– Pardon ? Répondit le professeur se composant instantanément le masque de celui qui a horreur qu’on le dérange !
– Euh ! Jean-Claude C… conseiller municipal.
Le type tend une main au professeur que Martinov ignora superbement !
– Si vous pouviez faire vite !
L’intrus est décontenancé, vexé même, à ce point que Béatrice trouve que quand même il exagère, et croit diplomatique d’intervenir.
– Excusez mon ami, nous avons quelques soucis en ce moment ! Mais nous aimerions terminer ce repas sans être dérangé !
Elle lui dit cela avec son plus beau sourire. L’autre ne sait plus trop quoi faire, il se recule, semble hésiter, puis s’adressant à l’assistante du professeur !
– Je pourrais vous dire un mot tout à l’heure ?
– Juste un, alors !
– Ok, je reste dans le coin !
– Pas moyen d’être tranquille… Commença Martinov, sur la défensive !
– T’es un vrai sauvage !
Ils oublièrent l’incident et se mirent à parler de tout et de rien. Une demi-heure plus tard, ils se levèrent de table, Béatrice découvrit alors le conseiller municipal, quelques tables plus loin qui se levait à son tour et qui venait à leur rencontre.
– Bon, chuchota Béa, je vais voir ce qu’il veut ! On se retrouve dans ta chambre !
Cette perspective eut pour effet de dérider complètement le vert professeur qui du coup monta les escaliers, gai comme un pinson ! Martinov retira sa veste, s’assit sur le lit et entreprit de jeter un coup d’œil aux nouvelles du jour, plus tellement fraîches déjà !
– Toc !
Il se releva en maugréant, prêt à éconduire l’intrus !
– Béatrice déjà ! S’étonna-t-il.
– Ce fut rapide !
– Qu’est-ce qu’il voulait ?
– Me refiler un dépliant !
– Hein ! Et c’est pour ça qu’il est venu nous casser les pieds ?
– Attend, tu vas rire, il nous prend pour des journalistes…
– Ben oui, c’est normal, c’est la caissière qui a dû lui répéter !
– Ça j’avais compris ! Mais il voulait qu’on fasse de la promotion pour un musée du coin !
– Un musée de quoi ?
– La maison de Cendrillon ! déclara Béatrice avec emphase.
– N’importe quoi ?
– Alors comme je lui ai fait comprendre que j’en avais rien à foutre, il m’a dit qu’on devrait y aller, que ça valait le coup de faire un article, et même qu’il devait s’y passer des drôles de choses !
– Fais voir !
Martinov, lu, amusé, le dépliant publicitaire. Il y était indiqué que la réalisation et le fonctionnement de ce musée n’avaient été possibles qu’avec le soutien financier du département du Doubs et de la région de Franche-Comté. Ça, c’était l’alibi culturel, sinon c’était plutôt gonflé, On y expliquait qu’on avait retrouvé un vieux manuscrit d’une certaine Cendrine Lion, qui prétendait ni plus ni moins avoir été la maîtresse de Charles Perrault et qui lui aurait inspiré le conte en prose bien connu. Le manuscrit donnait parait-il moult détails sur son environnement mobilier de l’époque à ce point qu’on avait pu le reconstituer. Il était également précisé que cette jeune femme était une grande collectionneuse de chaussures, qu’elle éprouvait un plaisir irrationnel à mettre en valeur ses pieds, lesquels étaient parait-il si jolis que c’est en les regardant que Perrault devint amoureux de la jeune femme !
– Hein ? Questionna la jeune femme que cette phrase venait d’interpeller.
– Ils disent que » ses pieds étaient si jolis que c’est en les regardant que Perrault devint amoureux de la jeune femme ! »
– Perrault était fétichiste du pied ?
– Je ne me suis jamais penché sur la question !
– Ça peut être une grille amusante pour relire Cendrillon, tiens, il faudra que j’essaie !
Béatrice se déplaça jusqu’à la fenêtre, elle donnait sur la rue et on découvrait au loin les vertes collines de la région baignant dans le soleil du couchant !
– Belle région ! Dit-elle simplement !
Martinov ne répondit pas, une immense complicité les unissait depuis la découverte du » lapin dur « , mais ils étaient loin d’être amant et maîtresse. Pourtant parfois ils se laissaient aller à de grands élans de tendresse où le sexe n’était guère absent. Mais la chose était rare, et c’était toujours Béa qui prenait l’initiative. Cette invitation dans sa chambre pouvait être l’une d’elle, mais ça pouvait être aussi n’importe quoi d’autre, simplement le plaisir de continuer à bavarder ensemble ! Elle revint vers lui !
– Je croyais que c’était de Grimm, Cendrillon ?
– Non tu confonds avec la Belle au Bois Dormant ou avec Peau d’âne, je n’en sais rien, tout ça, ça se ressemble !
– Tu te rappelles cet été quand tu as joué avec mes pieds ?
– Oh ! Oui !
– Tu crois que Cendrillon, elle jouait aussi comme ça avec Perrault ?
– Finalement je ne me rappelle plus bien, il faudrait qu’on y rejoue pour que je me le remémore !
– Cochon ! Lança Béatrice en minaudant.
– Voyou !
– Comment on dit voyou au féminin ?
– On dit voyou !
– Et bien le voyou il a envie de se faire embrasser les pieds par mon petit professeur !
– Donne ! répondit le professeur, sautant alors sur l’occasion
– Ils ont peut-être un peu sales ?
– Mais non !
– Mais si !
– Donne, je te dirais !
Alors Béatrice lui tendit son pied gauche, un joli pied bien dessiné, aux ongles vernis d’un joli rouge, il mit son nez au-dessus de la naissance des orteils !
– Ce n’est pas désagréable !
– Je te dis que tu es un cochon !
– N’exagère pas ! Tu puerais des pieds, je ne le ferais pas !
– Tu n’aurais pas dû dire ça !
– Et pourquoi donc !
– Parce que je voulais me les laver !
– Et alors ?
– Et alors c’est toi qui vas me les nettoyer avec ta langue !
– Juste un peu alors ?
– Allez, lèche !
– C’est vraiment ton truc, ça, hein ?
– Lèche donc ! Tu ne vas pas perdre au change, je te le promets !
– Oh, je te fais confiance !
– Comment tu les trouves mes petits petons ? Hein qu’ils sont adorables ? Je n’arrive pas à comprendre qu’il y ait des gens qui n’aiment pas les pieds. Tiens, c’est comme les mecs qui ne retirent pas leurs chaussettes pour faire l’amour, tu crois que c’est joli toi une chaussette ? Et je te dis pas quand tu as un gros orteil avec un ongle mal entretenu qui sort bêtement de son trou !
Martinov, ne releva pas, se demandant combien de types Béatrice pouvait avoir connu pour avoir une telle connaissance de ce genre de choses. Mais il était vrai qu’elle lui avait confié avoir eu une période assez agitée dans sa vie, il continua donc à lui faire plaisir, léchant, embrassant, caressant et massant le pied, sachant qu’en retour, il finirait par avoir sa petite récompense. Ça ne tarda pas !
– Alors, tu voudrais que je m’occupe de ta quéquette ?
– Ben…
– Elle doit être en pleine forme, hein ? Attend, je vais me rendre compte ! Rajouta-t-elle.
Et sans lui laisser le temps de répliquer, elle posa son pied nu sur la braguette du professeur, qui béat de contentement se laissait faire, se sentant envahir par une douce excitation.
– Allez baisse-moi ton bénouse, on va innover !
– Tu vas faire quoi ?
– Fais-moi confiance, mon petit professeur !
Martinov, comme demandé, dégrafa son pantalon et le fit descendre sur ses chevilles. Son slip parcourut le même chemin quelques courts instants après, le laissant la pine à l’air et bien raide devant sa coquine d’assistante.
– Elle est mignonne ! Tu sais ?
– Bof, y a mieux !
– Y a toujours mieux, mais la question n’est pas là, je l’aime bien ta bite !
A ces mots, le petit macho caché dans tous les bonhommes se gonfla la poitrine de satisfaction, mais il n’eut guère le loisir de méditer davantage sur la profondeur de ces étranges propos car Béatrice entreprit de coincer le sexe du savant homme entre ses deux pieds, puis d’entamer ainsi une étrange masturbation.
Ce jeu dura quelques minutes. L’excitation montait, montait et rendait le professeur plus hardi :
– Si tu te mettais à l’aise ? Demanda-t-il alors à son assistante.
– T’as envie de voir mes nénés, c’est ça ?
– Ben, oui…
– T’as raison, on va se foutre à poil !
Et joignant le geste à la parole, Béatrice dégrafa son pantalon. Du coup Martinov se dépêcha d’enlever ses chaussures, se débarrassant de tout ce qui dégringolait sur ses chaussettes.
– Quand je vais être à poil, tu vas me sauter dessus ? Demanda la jeune femme.
– Je vais essayer de me tenir !
– Non, je veux que tu me saute dessus, j’ai vraiment envie que tu fasses ça ! Tu te fous une capote et tu fonces !
Le professeur regarda sa partenaire, incrédule, l’excitation lui rosissait le visage, il décida alors de faire comme elle voulait. Il finit prestement de se déshabiller, se protégea. Béatrice pour sa part eut tôt fait de libérer ses petits trésors, elle se jeta alors sur le lit, s’y installa sur le dos, écarta ses jambes.
– Viens !
Martinov se dit alors qu’avant de la pénétrer, il aurait été bien agréable d’aller lui sucer le sexe, mais non, elle voulait jouer les sauvages !
– Viens, viens vite, j’ai envie !
Alors le professeur, la pénétra, la besogna, et à sa grande surprise la découvrit très vite en train de pousser des séries de petits cris de jouissance en balbutiant des : » C’est bon ! Continue ! Continue ! C’est bon ! » (air connu). Puis tout d’un coup elle le supplia :
– Dans mon cul ! Viens dans mon cul !
Martinov ne se le fit pas dire deux fois, sodomisa la belle en cadence er finit par décharger dans un grand râle, il était complètement crevé, il se fatiguait vite, mais le regard radieux que lui lança alors Béatrice fut la plus belle de ses récompenses, ils s’enlacèrent tendrement et restèrent ainsi un long moment.
C’est quelques minutes plus tard, alors que le professeur se demandait ce qui avait bien pu mettre la jeune femme dans un état pareil, que celle-ci se relevant signifia à ce dernier qu’elle irait bien maintenant prendre une douche, et qu’après direction dodo. Autrement dit, elle lui disait de la laisser. Martinov en eut le cœur un peu pincé, mais après tout se dit-il « Ne demandons pas l’impossible ! » Il lui fit un chaste bisou, entrepris de se rhabiller, et c’est alors qu’il franchissait le pas de la porte qu’elle lui demanda :
– On ira demain voir le truc de Cendrillon ?
MARDI
Le lendemain matin, ils décidèrent de faire une grande virée dans le secteur. Il finirait l’après-midi au musée de Cendrillon puisque celui-ci n’ouvrait ses portes qu’à 16 heures. Ils durent demander quelques conseils à la gérante de l’hôtel qui s’empressa de leur donner, en glissant toutefois un certain nombre de questions insidieuses propre à satisfaire sa curiosité maladive, mais sur ce point elle fit chou blanc.
Ne nous attardons pas plus sur cette magnifique journée aussi bucolique qu’ensoleillé et rendons-nous un peu avant 16 heures devant ce mystérieux musée. Quelques personnes attendaient l’ouverture en flânant aux alentours.
– Regarde la plaque ! Lança Martinov, à l’adresse de son assistante, ça n’a pas l’air de marcher très fort !
La jeune femme s’approcha. Effectivement la plaque indiquant les heures d’ouvertures avait connu plusieurs modifications. La mention visite guidée à 14 heures et à 17 heures avait été remplacée par un seul horaire. Mais il y avait encore plus intriguant, une seconde plaque, en dessous de la première avait vu ses inscriptions masquées par un ruban adhésif de piètre qualité qui à moitié enlevé laissait pour qui s’en donnait la peine deviner cette ahurissante information :
Visite spéciale pour adulte, tous les vendredis à 21 heures !
Nos deux héros se regardèrent circonspects, puis renoncèrent à comprendre. L’heure approchait maintenant et quelqu’un vint prévenir de l’ouverture imminente des portes. Du coup une file d’attente se constitua. Oh, ce n’était pas la grande foule, un couple de germanophile assez quelconque, un couple avec trois gosses qui manifestement n’avaient aucune envie particulière de pénétrer en ces lieux, un type tout seul, rouquin avec de grosses moustaches, et puis… … et puis, ils s’aperçurent que le type n’était pas vraiment seul, il appela en direction d’une voiture
– Carole ! Ça ouvre !
Et voici que Carole, ouvre sa portière et s’avance vers le petit groupe. Martinov la regarde comme le loup de Tex Avery. Il faut dire qu’il y a de quoi, une grande brune, au visage parfait et souriant, de longs cheveux bruns, la peau mate, une robe noire très simple et décolletée juste ce qu’il faut ! Une petite merveille !
Nous ne raconterons pas ici toute la visite, très genre « on n’a pas grand-chose mais on vous montre tout » ! Des objets, vêtements et meubles d’époque, le soi-disant manuscrit signé Cendrine Lyon. Un petit montage vidéo, des panneaux explicatifs qui répétaient trente-six fois la même chose. Bref tout cela n’avait que peu d’intérêt. C’est à la fin que le guide fit asseoir tout le petit groupe de visiteurs dans une petite salle munie d’une mini-scène.
– Mesdames Messieurs, le mythe de Cendrillon n’est pas mort, et nous allons essayer de le faire revivre devant vous ! Je vais avoir besoin de deux volontaires, à moins que les volontaires je ne les choisisse moi-même !
Il devait bien sûr répéter la même chose à chaque séance… Il jeta un regard circulaire à la salle, puis s’adressant à Carole lui demanda :
– Voudriez-vous chère madame, être notre Cendrillon de ce soir ?
Carole ne se fit pas prier, répondit par un très gracieux et approbateur sourire et se prit la main que lui tendait le guide. Il la fit asseoir quelques instants dans un fauteuil soi-disant d’époque, et l’affubla d’abord d’une sorte de coiffe assez ridicule, puis d’un châle sans beaucoup de classe. Les spectateurs commençaient à se demander quelle était cette mascarade, quand ils comprirent qu’effectivement cela n’avait aucune importance sinon celle d’introduire la suite. Le guide se tourna alors vers le public et d’un air rigolard lança sa tirade :
– Voyez, vous mesdames et messieurs, je n’arriverais jamais à transformer cette charmante personne, au fait c’est comment votre prénom, chère Madame ?
– Carole !
– Donc je n’arriverais jamais à transformer Carole en Cendrillon ! Parce qu’il manque un élément essentiel ! Essentiel, que dis-je ? Fondamental, pour que cette transformation ait lieu ! Et savez-vous justement ce qu’il manque ? Quelqu’un dans le public le sait sans doute ?
Après un silence révélateur, Béatrice ne put s’empêcher de donner la réponse :
– Les chaussures !
– Bien sûr ce sont les chaussures, mais admettez, que des chaussures, ne s’essaient pas comme des chapeaux, et encore moins comme un châle, mais nous avons une collection de chaussures de toutes tailles, et si vous le voulez bien, Carole va m’accompagner derrière ce rideau, nous allons choisir ses chaussures ensemble et après… Mais pour vous faire patienter, nous allons vous passer une petite vidéo, elle ne dure que cinq minutes et après nous revenons !
Carole et le guide disparurent derrière la tenture. La vidéo de patience n’était qu’un machin expliquant par quels fonds le musée avait été créé. On y apprenait qu’il s’agissait d’une initiative personnelle suite à la découverte du fameux manuscrit, et que l’affaire avait été jugée suffisamment culturelle pour être ensuite subventionné par le conseil général (ou régional, je ne sais plus) Et voici Carole de retour. Non elle n’a pas ses nouvelles chaussures, elle a toujours ses pompes d’origine ! Mais les souliers de cendrillon, (des souliers en verre) sont portés à bout de bras par le guide sur un coussin de velours rouge. Celui-ci fait alors rasseoir Carole.
– Et voilà ! Nous allons à présent avoir besoin d’un prince charmant ! Mais avant nous allons débarrasser Cendrillon, pardon, Carole de ses chaussures du 21ème siècle !
Alors le guide prit délicatement en main le pied droit de Carole, défit la lanière avec une lenteur toute calculée, retira la chaussure et entrepris de lui masser légèrement le pied ! A ce spectacle Béatrice commença par se réveiller de son apathie et lançait des yeux étonnés vers ce pied que les grosses mains du guide étaient en train de polluer. Comme elle aurait bien aimé être en ce moment à la place de ce rustre ! Soudain elle eut envie, envie de toucher ses pieds, de les masser, de les caresser, de les embrasser… Le guide la fit sortir de sa rêverie, il regarda alors le professeur Martinov, et lui lança :
– Si Monsieur veut bien être le prince charmant qui chaussera Cendrillon ?
Martinov commença par refuser, il était venu uniquement pour faire plaisir à Béatrice et n’entendait pas à priori jouer à ce qui lui semblait la dernière des bouffonneries. Pourtant le sourire d’invitation que lui lança Carole le faisait hésiter ! Il allait se jeter à l’eau quand une force impulsive poussa Béatrice à intervenir !
– Moi je veux bien !
– Mais non il faut un homme ! Dit quelqu’un !
Il se passa alors quelque chose de trouble, les deux femmes se regardèrent !
– J’aimerais bien que ce soit Mademoiselle ! Finit par dire Carole !
– Alors pourquoi pas, tout cela n’est qu’un jeu n’est-ce pas !
– Oui, mais pour la photo, ça ne va pas aller ! Reprit le râleur !
– Nous ferons un deuxième essayage pour la photo, ce n’est pas un problème ! Concilia le guide !
C’est ainsi que Béatrice se retrouva sur la scène dans un étrange état, mais elle en avait conscience. Elle ne souhaitait pas revenir en arrière, mais savait parfaitement le jeu dangereux. Carole tendit son pied gauche, et Béatrice se baissa alors, à l’instar d’une vendeuse de chaussures, regrettant à cet instant de s’être vêtue d’un pantalon. Elle aurait sinon pris un plaisir pervers, pensait-elle à provoquer de furtifs effets de culotte. Elle prit le pied offert dans sa main, un pied qu’elle jugeait parfait, elle le caressa négligemment, en testant l’infinie douceur de sa peau. Un frisson de plaisir envahit le corps de l’assistance du professeur Martinov, à ce point qu’un épanchement humide ne tarda pas à se manifester quelque part entre ses jambes. Son regard devenait trouble, presque vitreux, il rencontre celui de la fausse Cendrillon. Les deux femmes échangèrent un sourire, oh combien signifiant !
– On se verra tout à l’heure ! Chuchota Carole.
Le contact était donc réalisé, et déjà le désir de Béatrice se projetait vers cet avenir proche. Elle ne put s’empêcher de conclure par un chaste et bref baiser sur le dessus de ce pied si sensuel, puis elle se reprit, et lui enfila ses chaussures de verres.
A la sortie, alors que les visiteurs allaient rejoindre leur véhicule, Béatrice anxieuse attendait un signe de sa Cendrillon. Il vint très vite, celle-ci s’approcha d’elle, et s’adressant au professeur :
– Je vous l’enlève juste une minute, vous permettez ?
– Faites comme chez-vous ! Répondit simplement le professeur, un peu désabusé
Le » musée » était jouxté par une sorte de petit chemin conduisant vers, semble-t-il des jardins privatifs situés un peu plus loin, une fois dans ce chemin, on était théoriquement à l’abri de tous regards. C’est là que Carole entraîna Béatrice en lui prenant la main. Les choses se passèrent à la vitesse de l’éclair. Un bref regard de Carole pour s’assurer de l’absence de tout voyeur involontaire, puis elle enlaça carrément Béatrice avec une fougue telle qu’elle plaqua cette dernière contre le mur en vieilles briques roses. Les visages se rapprochèrent avec un volontarisme aussi simultané que partagé. Les bouches s’ouvrirent, les langues se rencontrèrent. Et pendant ce temps-là les mains s’agitaient, parcouraient les corps, pelotaient, caressaient.
Carole finit par se dégager :
– Toi, je te veux ! Dit-elle simplement.
– Quand tu veux ! Répondit Carole !
Cette dernière lui tendit alors une carte qu’elle avait sans doute déjà préparée.
– Téléphone-moi dans une heure, Tchao !
Et elle disparut…
– Vous vous êtes donné rendez-vous ? Demanda innocemment Martinov.
– On ne peut décidément rien te cacher, mon petit professeur !
– Tu sais que j’allais y aller, lui mettre ses chaussures, tu m’as brûlé la politesse !
– Oh, je suis désolé, je n’ai pas pu m’en empêcher ! Lui dit-elle avant de lui faire un petit bisou affectueux sur le bout du nez.
– C’est vrai qu’elle est impressionnante ! Surenchérit le professeur.
– Tu l’as dit ! Tu as vu ses pieds ?
– Ses pieds, ses pieds ! Ça t’obsède décidément !
– Ben quoi, c’est joli un pied !
– Ouais, mais bon, pour moi un pied c’est fait pour marcher !
– Et un cul c’est fait pour s’asseoir ?
– Martinov renonça à continuer la conversation se sachant vaincu d’avance sur ce genre de sujet.
MERCREDI
Béatrice avait rendez-vous le lendemain matin avec Carole, cette dernière lui avait indiqué ne pas être libre l’après-midi, mais qu’un 10 à 12 la comblerait d’aise. Restait à déterminer où ! Or pour des raisons qu’elle ne savait pas trop expliquer, notre héroïne préférée n’avait nulle envie de s’envoyer en l’air avec Miss Carole à quelques pas de couloir de la chambre du professeur Martinov. Elle ne lui devait rien, elle ne se considérait absolument pas comme sa maîtresse, non ça l’embêtait, c’est tout ! C’est donc à Besançon que les deux femmes décidèrent de se voir, à l’hôtel ou Carole était descendue. Apparemment donc elle y avait réservé une chambre pour une personne seule. La présence de son chevalier servant d’hier restait donc un mystère, mais de peu d’importance. C’est néanmoins avec une certaine nervosité que Béatrice s’y rendit, elle regrettait de ne pouvoir mieux soigner sa toilette, mais elle n’avait pas apporté grand-chose pour ce voyage qui à l’origine ne devait être qu’un simple aller-retour. Elle n’était pas lesbienne, bisexuelle certes car il faut bien employer le mot, mais ses expériences en ce domaine restaient malgré tout assez limitées.
– Bonjour toi ! L’accueillit Carole en abordant un sourire très chatte.
Elle embrassa très brièvement sa visiteuse sur les lèvres et se recula !
– Je te plais comme ça ?
Béatrice restait sans voix ! Subjugué par le spectacle de cette sculpture vivante planté là devant elle. Imaginez le tableau : La Carole revêtue uniquement d’une petite nuisette rose quasi transparente dont le tissu frôlait de façon impudique deux gros tétons bruns coquinement érigés et surplombant deux magnifiques globes un peu lourds mais au galbe parfait. Un string dont on se demandait bien quel pouvait en être l’utilité complétait et finissait de parachever la panoplie de son hôtesse qui se laissant dévisager sans aucune pudeur arborait un sourire désarmant. Béatrice se demandait quelle était la bonne conduite à adopter. Ou bien se jeter dans ses bras et passer tout de suite aux choses sérieuses, ou alors la complimenter pour cette vision de rêve ! Mais ce qu’elle ne savait pas, justement, c’est comment on faisait pour complimenter une telle apparition. Supputant néanmoins que la féliciter lui ferait plaisir elle sortit une phrase dont la profondeur lui paraissait abyssale :
– T’es vraiment top, toi !
– L’essentiel c’est que je te plaise ! Répondit la brune Carole
Juste un instant, un très bref instant, Béa se demanda le pourquoi de tels artifices, plus adaptés, selon elle, à séduire un homme qu’une femme, mais cette réflexion ne perdura pas. Béatrice se rapprocha, prête à enlacer enfin son hôtesse, celle-ci se recula, alors, le visage hilare, l’assistante s’avance de nouveau provoquant un nouveau recul de la brune qui la regardait dans les yeux.
– Tu ne veux pas que je te touche ? Demanda Béa, quelque peu surprise.
– Oh ! Si !
– Ben pourquoi tu te recules, alors ?
– Je profite du spectacle !
Béatrice interloquée se demanda de quel genre de spectacle il pouvait bien s’agir, sa toilette était d’un quelconque et son look ne pouvait en aucune manière soutenir la comparaison avec celui de Carole.
– Quel spectacle ?
– Tes yeux !
– Et qu’est-ce qu’ils ont mes yeux ?
– Ils sont remplis de désir !
– C’est bien la première fois qu’on me dit une chose pareille !
Béatrice avança de nouveau, et cette fois, Carole la laissa s’approcher, et tandis que leurs bouches communiaient, les mains de notre espiègle laborantine s’aventuraient sous la nuisette, caressant en une élégante courbe le dessin du sein, récidivant vers le ventre puis s’enhardissant à remonter là où elle avait commencé, tentant un contact appuyé du flanc du doigt sur le téton, testant les réactions, puis rassuré recommençant, plus rapide, plus nette, plus précise. Les doigts s’écartèrent afin que le contact de la main avec la peau soit la plus prenante possible, le téton restant en contact avec le creux de la paume. Béa sentis son pantalon tomber sur ses chevilles, la petite culotte prit le même chemin mais s’arrêta à mi-cuisse, l’humidité dont elle s’était imprégnée provoquant un frôlement de froid sur son corps. La position des deux femmes rendait pour Carole mal aisé le contact frontal, aussi préféra-t-elle pétrir les fesses de sa partenaire. Ça tombait très bien, elle adorait ça, Béa n’en pouvait plus, le contact de sa main avec les pointes de la brune l’électrisait, elle tenta de pincer, légèrement mais carrément.
– Arrête !
Instantanément, Béa stoppa son geste, un peu contrariée
– Tu n’aimes pas ?
– Si ! Fais comme si je n’avais rien dit, continue !
– Comme ça ?
– Ouiiiii !
– Plus fort ?
– Arrête !
Il n’y a rien de plus frustrant que de se poser des questions techniques en pleine excitation et Béa ne comprenait plus très bien en ce moment ce que souhaitait vraiment Carole. Elle décida de jouer la carte de » l’humilité » :
– Dis-le-moi, s’il y a quelque chose que je ne fais pas bien ! En fait j’ai beaucoup de choses à apprendre…
– Il faut qu’on apprenne à se connaître ! On se met à poil ?
Et joignant le geste à la parole, elle retira sa nuisette et son string dans la foulée. Béatrice fut bien obligée de se décider à en faire autant
– Tu vas être déçue ! Prévint-elle.
– Ça m’étonnerait !
– Je suis pourtant d’un quelconque !
– T’inquiète !
Béa finit de se déshabiller, elle n’aime pas ce moment, mignonne, plaisante, certes, mais elle se disait ne pouvoir soutenir la comparaison avec sa peau trop blanche, ses marques de sous-vêtements sur la peau, ses seins communs.
– Tu veux me faire plaisir ? Demanda Carole.
Bien sûr que Béa voulait lui faire plaisir ! N’était-elle pas là aussi pour ça ? Elle le lui dit !
– Je voudrais qu’on redémarre comme au musée ! Demanda la grande brune.
– Elle s’assit alors dans un fauteuil et demanda à l’assistante du professeur Martinov de venir s’occuper de ses pieds. Du coup Béa jubilait, elle avait cru que le fétichisme de cette rencontre n’allait que dans un sens, elle découvrait à présent que leurs fantasmes se rejoignaient. C’était inespéré ! Elle se mit à genoux devant Carole et baissant la tête entreprit de lui lécher le pied après l’avoir caressé. Puis se rendant compte que la position n’était guère pratique, elle s’allongea au sol, sur le dos et s’empara des orteils offerts, les léchant les uns après les autres, en gardant le plus gros pour la fin, l’humectant de salive et le suçant comme elle l’aurait fait avec une courte bite. L’excitation était à son comble, son entre-jambes coulait. Mais Carole lui renvoyait la réciprocité de son désir, elle se masturbait tandis que l’on s’occupait de son pied, puis n’y tenant plus, elle appela sa complice à finir le travail
– Viens !
Comme une furie, Béa se jeta alors sur la chatte de sa partenaire, lapa la mouille dégoulinante, se régala de son jus légèrement sucré, puis attaqua de ses doigts le clitoris érigé et décapuchonné. Quelques mouvements furent suffisants pour la faire jouir, elle s’affala alors comme un chiffon dans son fauteuil. Béa était sur le point de jouir à son tour, elle attendit quelques instants que Carole se remette de ses émotions, puis impatiente, réattaqua ses seins quelques instants, avant dans un grand élan de tendresse lui embrasser la bouche.
– Attends, faut que j’aille pisser ! Finit par murmurer Carole.
Béa se demanda alors s’il fallait qu’elle lui dise que ce genre de chose l’intéressait aussi bougrement, mais elle ne savait pas comment l’autre réagirait, elle ne voulait pas non plus prendre le risque de rompre le charme. Puis dans un souffle, elle trouva la formule qui lui permettait de prendre un moindre risque :
– Je peux regarder ?
– Coquine ! Dit simplement Carole. Elle ne l’encourageait pas, elle ne la décourageait pas non plus.
Elle laissa pourtant la porte de la salle de bain ouverte. Béatrice ne bougea pas, tendit l’oreille et entendit le bruit des premiers clapotis qui soudain s’arrêtèrent.
– Ben alors ! Tu viens regarder ou pas ?
Non ! Béa n’y croyait pas ! Comment cette femme pouvait à ce point calquer ses propres fantasmes ? Elle s’approcha, contemplant Carole, qui pour l’instant se retenait !
– Vas-y, mate !
– C’est beau ! Heu… Tu ne voudrais pas te relever un petit peu ?
Carole n’est pas choquée, mais elle est surprise et cela se voit, elle accède néanmoins au désir de Béa et se relève un peu rendant ainsi beaucoup plus visible la chute de son petit pipi doré ! L’excitation brûle maintenant le corps de Béa, entrée dans une spirale de désir, elle en veut encore, ne se contrôle plus, et alors que Carole allait s’emparer d’une feuille de papier toilette afin d’essuyer son intimité, elle lui crie :
– Non, laisse !
Carole suspend son geste, incrédule, permettant alors à Béa de s’agripper à son corps et de mettre sa bouche en contact avec sa chatte afin d’y laper les dernières gouttes.
– T’es vraiment une cochonne ! lui lance Carole
Ça lui a échappé, elle le regrette déjà. Mais Béa s’est reculée, contrariée, se rendant compte qu’elle a commis l’erreur d’imposer trop vite son fantasme à sa partenaire.
– Continue ! Tente de rectifier Carole.
– Tu dois me trouver complètement folle ?
– Mais non ! Simplement je n’ai pas l’habitude, mais ça ne me choque pas ! Allez, continue !
C’est limite rattrapage diplomatique, mais cela suffit à sauver les apparences, et Béa se remet en position, plus par principe que pour autre chose car il n’y plus de pipi à y laper. Reste le goût capiteux de ce sexe offert dont elle se délecte en lui aspirant les nymphes avec gourmandise ! Carole se laisse faire, d’abord passive, puis s’abandonne, carrément affalée, assise sur la cuvette, les jambes écartées, puis l’excitation renaît vite, sa respiration se fait haletante, et la langue de Béa recueille de nouveau l’humidité de son plaisir. Elle ne tarde pas à jouir de nouveau !
– T’es une vraie sorcière ! Parvint-elle à lui dire dans un souffle en affichant un sourire ravi.
Béatrice ne répond pas, elle est déchaînée, elle a envie à présent que l’on s’occupe d’elle, elle se relève, se penche, cherche la bouche de sa partenaire, l’embrasse avec passion et s’arrange pour qu’en même temps les pointes de ses seins frôlent le corps de la grande brune. Ce contact l’électrise. Un soupir ! Encore un autre ! Elle n’en peut plus, se redresse et finit par coller sa chatte sur la bouche de Carole, toujours assise. Ce duel d’amour commencé sous la direction de la brune est maintenant entièrement contrôlé par Béatrice. C’est elle qui conduit, c’est elle qui dirige, c’est elle qui opère. La langue de Carole s’immisce dans son sexe, le fouille, tandis que ses mains lui agrippent les fesses, allant jusqu’à en lui écarter les hémisphères. Des doigts s’approchent de son anus. D’instinct elle s’ouvre, goûtant volontiers cette pratique. Mais la montée incontrôlable de la jouissance l’empêche de disperser ses attentions, elle ne se concentre plus que sur ça, laissant tomber ce qui se passe derrière et laissant ses muscles accepter ce doigt qui la fouille et qui commence à remuer de façon impertinente. Ses soupirs et son halètement deviennent de plus en plus rauques, de plus en plus rapprochés, de plus en plus violents, et soudain son corps se tétanise un instant, puis se relâche au milieu d’une bruyante explosion de jouissance. Elle reprend un peu son souffle. Les deux femmes se regardent, un même sourire éclaire leur visage. Béa rit, c’est nerveux. Et c’est communicatif, Carole en fait autant. Elles s’enlacent de nouveau
– Ça va ? Demande la brune.
– Yes !
– Tu veux prendre une douche ?
– Je ne sais pas, j’ai surtout soif !
– Je vais faire monter quelque chose, tu veux quoi ?
– Rien ! Je vais boire un peu de flotte !
– Comme tu veux ! Répond Carole. C’est dingue d’avoir fait ça, on se connaît à peine ! T’es en vacances ici ?
– Oui !
– Tu fais quoi comme boulot ?
– Je bricole, disons que je fais de la recherche !
– De la recherche ? Ah ! Tiens j’aurais parié que tu étais journaliste !
Béa s’étonne de cette coïncidence. Qui a pu lui souffler ce genre de chose ? L’hôtelière qui l’aurait dit au responsable du musée qui lui aurait répété ? Mais dans quel but ? Mais elle ne voit pas pourquoi elle irait mentir à Carole ? Pourquoi faire ?
– Non, je ne suis pas journaliste !
Carole paraît un moment contrarié par cette réponse, elle regarde fixement Béatrice, semble réfléchir, puis se met à rire.
– Ah ! Tu n’es pas journaliste, alors ? Mais ça n’a aucune importance ! Hein ?
Elles papotèrent quelques instants. Carole restait très évasive sur elle-même. Elle expliqua néanmoins qu’elle était pour quelques jours dans la région pour affaire de famille, qu’elle en avait profité pour rendre visite à son cousin, lequel ne pouvait l’héberger en raison de la petitesse de son appartement. Par contre Carole était intarissable sur les beautés de la région qu’elle décrivait avec un enthousiasme tout communicatif. C’est alors qu’elles allaient se séparer que la brune lui proposa de se revoir dès le lendemain
– Je ne voudrais pas qu’il y ait de quiproquo, demain après-midi, je dois partir à Angers, j’ai un tournage. On ne se reverra sans doute jamais. Alors demain on pourrait aller prendre un bon petit déjeuner ensemble dans un bistrot, et puis si on est en forme, pour la suite, on improvisera.
Béa engrangea l’information sur les activités professionnelles de son amante. Ce rendez-vous contrariait les plans de balade qu’elle avait échafaudés avec le professeur Martinov, mais bien sûr qu’elle s’arrangerait, bien sûr qu’il n’y avait aucun problème. Cette séparation là, ce matin, n’était donc plus un adieu et pour elle, c’était formidable.
JEUDI
Elles avaient rendez-vous quai de Strasbourg à 10 heures. Toute pimpante, Béa était arrivé en avance. A dix heures ¼ Carole n’était pas là ! A 10 h 30 Béa manifesta des signes d’impatience et se résolut à l’appeler sur son portable. Elle n’obtint que son répondeur, celui-ci ânonna qu’on était bien sur la messagerie de Carole Perrier, laquelle ne pouvait répondre pour le moment. A onze heures Béa téléphona à l’hôtel. Personne n’était enregistré à ce nom, mais on lui indiqua que l’occupant de la chambre 37 avait réglé sa note tôt dans la matinée. Non, elle n’avait laissé de message pour personne… Et voilà ! Béa fit ce que tout le monde fait dans ces circonstances, elle attendit encore, puis finit par rentrer, se faisant une raison. Carole avait dû avoir un impondérable. Resterait un souvenir ! Inoubliable !
Ce n’est que le soir qu’elle retrouva le professeur Martinov, il allait pour rentrer à l’hôtel, elle le rattrapa :
– Alors mon petit professeur, on s’est bien baladé ?
– Super, mais j’en ai plein les pattes, et toi tu t’es bien éclatée avec ta nouvelle copine ?
On sentait bizarrement comme une pointe de jalousie dans le ton de Martinov.
– Tu parles ! Elle m’a posé un lapin, je suis rentrée, j’ai lu sur ton petit mot que tu étais parti en virée, alors du coup, j’ai fait pareil…
En allant récupérer leurs clés, la grosse gérante de l’hôtel les interpella.
– Un monsieur a laissé un message pour vous, mademoiselle !
Le cœur de Béa ne fit qu’un bond ! Ce ne pouvait être que Carole ! Elle ouvrit la petite enveloppe, fébrile…
– » Pouvez-vous m’appeler de toute urgence ? C’est au sujet de Carole.
– Pierre »
Surprise de s’angoisser pour ce qui n’était après tout qu’une tocade, elle contacta immédiatement cet inconnu, celui-ci s’obstina à, ne rien vouloir dire au téléphone, et précisa qu’il arrivait et qu’il serait là dans dix minutes.
Béa laissa Martinov monter prendre une douche et s’attabla, attendant ce mystérieux personnage ! Quelle ne fut pas sa surprise de voir arriver un homme, la quarantaine, dégarni, arborant une grosse moustache rousse ! Où avait-elle déjà vu ce type ? Et puis le déclic ! Le gars qui était avec Carole au musée ! C’est quoi ce bled où tout le monde croise tout le monde sans arrêt comme dans une comédie de boulevard ? Elle se leva d’un bond, se précipita vers lui.
– Vous avez des nouvelles de Carole ?
– Non, elle a disparu ? Et c’est pour ça que je viens vous voir !
– Attendez, j’ai rendez-vous avec un type qui …
Elle réalisa soudain et se reprit.
– C’est avec vous que j’ai rendez-vous ?
– Ben oui !
Ça se bousculait un maximum dans la tête de la pauvre Béa
– J’avais rendez-vous à 10 heures avec elle et elle n’est pas venue, c’est tout ce que je sais, je ne vois malheureusement pas comment je pourrais vous aider…
– Mais si ! Je vais vous expliquer…
– Attendez, comment avez-vous fait pour me trouver ? Coupa Béatrice.
– Ecoutez, laisser moi parler, sinon on ne va jamais y arriver !
– Dites-moi simplement comment vous m’avez trouvé et après je vous écouterais ?
– Carole m’avait confié qu’elle avait rendez-vous avec une journaliste qui était descendu à P… Ce n’était pas trop difficile, et puis j’avais votre description…
– Sauf que je ne suis pas journaliste !
Et elle allait rajouter » et que je ne me souviens pas avoir dit à Carole que j’étais descendu à P…. « , mais elle n’en était plus si certaine.
Pierre marqua un temps d’arrêt puis reprit :
– Pourquoi dites-vous que vous n’êtes pas journaliste, je comprends que vous vouliez garder l’incognito, mais c’est raté, tout le monde le sait.
Béa ne répliqua pas. A quoi bon lui expliquer tout cela ! Et puis étais-ce après tout si important ?
– Croyez ce que vous voulez, après tout… Je vous écoute…
Le dénommé Pierre prit une profonde inspiration voulant sans doute signifier par-là qu’il en aurait pour un certain temps :
– La maison de Cendrillon existe depuis environ deux ans, son fondateur était un certain Charles B… , il venait de Lyon. Il s’est pointé en demandant carrément une subvention municipale, il avait dû faire du lobbying car son projet a été aussitôt accepté. Pour le maire cela devait amener les touristes et faire connaître la ville, c’était un bon coup de pub. Moi je trouvais au contraire que ça nous… Au vote du conseil municipal, j’ai voté contre, j’étais le seul, mais ceci dit, je ne me suis pas acharné non plus…
– Parce que vous aussi, vous êtes conseiller municipal ?
– Oui, mais bon, laissez-moi continuer…
– Vous êtes agriculteur ?
– Certainement pas !
Béa s’étonna de la soudaine vigueur de sa réplique, mais essaya de ne pas le montrer.
– Je peux savoir ?
– Oui, mais tout à l’heure ! Bon, je continue, un jour je déjeunais avec le garde champêtre, c’est un ami, un type s’est pointé, affolé, un allemand et il nous a raconté une histoire bizarre. Il avait visité le musée avec sa femme, puis le lendemain celle-ci avait prétexté devoir faire une course urgente à P…, elle avait pris leur voiture et elle n’était pas réapparue. Le garde champêtre se voulut d’abord rassurant et précisa à son interlocuteur qu’on ne lui avait signalé aucun accident grave ces dernières heures. Puis abandonnant son repas, il demanda à l’inconnu de venir avec lui. Je les suivis également. Sans hésiter nous nous sommes dirigés vers le musée. La voiture du type était garée juste devant, pas même caché, ni même en retrait, non elle était là ! On sonne au musée, Charles nous répond, et quand on lui demande s’il n’a pas vu la dame que l’on recherche, il l’appelle, va la chercher, elle arrive… Et voilà que les deux époux se mettent à s’engueuler en Allemand, puis le type qui envoie un direct à la figure de Charles qui se retrouve le nez en sang. On les a séparés, le type s’est barré avec la bagnole, et nous on est reparti aussi, ça ne nous regardait plus, ce n’était qu’une affaire conjugale.
– Il est très fort votre copain, il se pointe comme ça au feeling au musée, et il trouve tout de suite… Ironisa Béatrice.
– Figurez-vous que j’ai eu exactement la même réflexion, et devant mon étonnement le garde champêtre m’a raconté le reste de l’histoire, il m’a expliqué que des cas comme ça il y en avait déjà eu plusieurs depuis deux ans. La première fois il avait simplement retrouvé la voiture de ‘épouse disparue en patrouillant… Et c’est à chaque fois pareil, des femmes qui apparemment de leur plein gré vont passer un jour ou deux avec Charles. Vous avouerez que c’est bizarre, ce type a un charme fou mais quand même…
– Moi je ne trouve pas…
– Justement, ce qu’on peut se demander c’est si pendant qu’il fait essayer des chaussures aux femmes dans la petite pièce à côté, il n’en profite pas pour les hypnotiser ou leur administrer une espèce de philtre d’amour…
– Et Carole dans tout ça ?
– Et bien justement, Carole, en ce moment, elle est avec lui…
– Mais comment en être sûre ?
– Sa voiture est garée devant le musée !
– Mais, écoutez, je ne comprends rien à votre démarche. Portez plainte pour séquestration, prévenez la gendarmerie, ou alors allez voir vous-même, mais pourquoi voulez que j’intervienne là-dedans…
– La gendarmerie ne veut plus entendre parler du musée, ils ne se déplacent plus.
– Ecoutez, je suis désolé, mais je ne pense pas pouvoir être d’une quelconque utilité dans ce méli-mélo !
– Si, il y a une personne qui abuse sexuellement de victimes que l’on ne déclare qu’abusivement comme consentantes !
– Montez un dossier, un dossier solide, puis prenez un avocat.
– Trop long, et trop aléatoire, ce qu’il me faut c’est un article de journal, un truc qui fera du bruit, qui sera reprit dans les journaux régionaux, qui obligera Charles à se mettre sur la défensive, jusqu’à ce qu’on cesse de subventionner son musée de merde !
Béatrice comprenait où Pierre voulait en venir, elle faillit redire une nouvelle fois qu’elle n’était pas journaliste, mais se dit que c’était peine perdue, la rumeur était plus forte qu’elle, elle se résolut à laisser le type délirer, après tout demain, ils ne seraient plus là…
– Et vous voudriez que je fasse un article !
– Oui, je ne vous le demande pas pour elle, mais faites-le pour Carole, c’est une brave fille ! Ça m’embête un peu de l’imaginer dans les grosses pattes de ce conard !
– Bon d’accord !
– Je vous ai apporté un peu de documentation, voilà, il y a un petit topo sur trois cas relevés par le garde champêtre avec les photos des victimes, on va appeler ça des victimes… un petit récit avec les circonstances et tout ça. Je vous rajoute une grande photo de Carole, celle-là faudrait la publier ! Et puis un petit curriculum de Charles, j’ai mis aussi son adresse, en fait, il n’habite pas au musée, peut-être qu’il serait intéressant de l’interviewer.
– Bon ok !
Le type finit par disparaître ! Elle parcourut un petit peu le dossier et le commenta avec Martinov qui venait de redescendre !
– Il est évident qu’il y a un problème entre ce type et le gars du musée.
– Et Carole ? Demanda Martinov.
– Probablement manipulée d’une façon ou d’une autre, ça me rend un peu mauvaise, décidément la race humaine est bien étrange…
– Et le dossier, il est intéressant ?
– Des conneries, où serait-il procuré les photos des nanas ? Ça ne tient pas debout. Allez ! On jette !
Et en un geste rageur, Béatrice déchira le petit paquet de photocopies et alla en déposer les débris dans la petite corbeille située près de la fenêtre de la salle à manger du restaurant.
VENDREDI
– Ça va ? Mon petit professeur a bien dormi ?
– Ça va ! Par contre toi, ça n’a pas l’air d’aller très fort !
– Si ! Si ! Mais je n’ai pas dormi beaucoup ! J’ai pensé à un truc, ce type est peut-être en train de nous endormir exprès et si ça se trouve Carole est réellement en danger. Je me demande si on ne pourrait pas se renseigner un petit peu ?
– Béatrice, on n’est pas des flics !
– Je voudrais simplement qu’on fasse deux choses, vérifier si la voiture est bien là où il nous a dit, et puis j’aimerais bien rendre visite à ce Monsieur Charles.
– Mais enfin, on n’est pas Tintin et Milou !
– Allez, tu peux me faire plaisir, on y va tout de suite, d’abord au musée, ensuite…
Elle réalisa que l’adresse était dans la liasse de feuilles jetée à la poubelle, hier soir. Elle prétexta la disparition d’un bracelet pour pouvoir aller inspecter les ordures de la veille, elles n’avaient pas encore été ramassées, mais évidemment elle y renonça assez vite…
– Bon on va rester une journée de plus et je vais te la trouver l’adresse, moi !
– Comment tu vas faire ?
– Si le musée est réellement subventionné, il doit y avoir un dossier à la préfecture, je prends le car pour Besançon et je te téléphonerai l’adresse sur ton portable. Pendant ce temps-là tu n’as qu’à aller voir pour la bagnole. !
Aucune voiture n’était stationnée devant le musée de Cendrillon, et manifestement celui-ci était à cette heure vide de tout occupant. Carole revint à pied vers le village sans se presser, puis une fois avoir eu connaissance de l’adresse elle se dirigea vers les lieux. Le professeur lui avait donné comme nom Patrick Dulac ! Pourquoi l’autre avait-il parlé d’un prénommé Charles ? Cela rendait encore un peu plus mytho l’étrange récit de ce curieux personnage.
Les Dulac habitaient dans une grande ferme restaurée qui servait aussi de gîte rural. Martine Dulac était une femme d’une quarantaine d’année, très agréable d’aspect, petite brune tout sourire, les cheveux mi-long et vêtue d’une petite robe noire à manches très courtes qui lui allait fort bien !
– Non, mon mari n’est pas là, mais entrez donc, il ne devrait pas tarder, il est allé chercher la presse, il ne s’attarde jamais…
Béatrice s’installa dans un fauteuil, et lui précisa qu’elle était journaliste et qu’elle souhaitait écrire un article pour parler un peu de cette fameuse maison de Cendrillon.
– C’est mon mari qui va être content, vous savez ça ne marche pas très fort en ce moment !
Béa soupira, au moins l’adresse était bonne, et comme la dame semblait disposée à faire la causette, elle décida d’en profiter !
– C’était pourtant une excellente idée !
– Oui, au départ, c’était une idée très ambitieuse, on voulait faire un truc plus axé spectacle que musée, cela devait s’agrandir avec le temps, on pensait qu’avec la subvention de la région et du département ça prendrait des proportions gigantesques.
– Gigantesques ?
– Pourquoi pas ! Des imbéciles ont bien réussi à faire un truc énorme au Puy du Fou avec des idées et des arrières pensées politiques douteuses.
– Certes ! Admis Béatrice !
– Dans Cendrillon, il n’y a aucun message politique, le seul message, il est symbolique, sexuel même ! Faut croire que c’est pas le bon créneau !
– Oui, j’ai vu que vous aviez organisé des séances pour adultes ?
– On a failli, on a failli, on s’est dégonflé, on a eu peur de perdre la subvention ! Mais c’est dommage on aurait pu rigoler ! Je vous offre quelque chose, un café, un thé ?
– Oui un thé, si ça ne vous dérange pas !
– Et hop ! Tandis que Madame Dulac s’en allait en cuisine, Béatrice en profita pour faire très vite le tour de la pièce, peu de photos, mais il y en avait quand même, l’une l’intrigua particulièrement. On y reconnaissait Martine Dulac plus jeune avec un homme à ces côtés, or cet homme n’avait rien à voir avec celui qu’elle avait vu officier sur la scène du musée, non pas du tout et à la limite il ressemblait plutôt à Pierre, le mythomane qui lui avait cassé les pieds la veille. Un frère ? Elle flairait derrière tout ce cirque une sombre histoire de famille extrêmement compliquée à démêler comme seules savent le faire certains habitants de nos campagnes ! Elle se rassit, prudente !
– Voilà, c’est du thé au Jasmin ! On me l’a rapporté du Japon.
– Merci ! Il sent très bon, en tous les cas !
– Je suppose que vous n’êtes pas venu spécialement pour le musée, ce n’est pas trop indiscret de vous demander ce qui nous vaut votre présence dans la région ?
Martine se faisait soudain très chatte.
– En fait, je suis en vacances !
– Ah ! C’est une très jolie région, savez-vous ? Par contre les gens, c’est pas évident ! Ici on nous a accepté parce que notre truc était censé faire de la publicité au village, mais sinon ce sont des rustres, ils nous méprisent profondément… par contre à Besançon, il y a plein de gens très intéressant, heureusement !
Béa ne savait trop quoi répondre à ces considérations qui arrivaient comme un cheveu sur la soupe, puis réalisa que son interlocutrice éloignait volontairement la conversation du musée.
– Est-ce qu’il y a des gens qui se sont opposé de façon agressive à cette idée de musée !
– Oui, mais c’est de l’anecdote, quelques lettres anonymes, un tag et un type qui nous a pris la tête au téléphone, mais ça n’a pas eu de suite…
Tout en disant cela, Martine eu un curieux geste, faisant manifestement semblant de se gratter elle dégagea son épaule, une bien ravissante épaule que le léger bronzage faisait refléter à la lumière. Béatrice en ressentit un léger trouble, mais se ressaisit en choisissant comme diversion toute simple d’avaler une gorgée de thé.
Un bruit de moteur !
– Ah ! Voici Patrick, mon mari !
Tout le monde connaît ce phénomène, parfois on cherche la solution de quelque chose, on se dit que tout est décidément trop embrouillé, puis survient le petit déclic, et alors, à une vitesse fulgurante notre cerveau nous aide à reclasser tout ce qui était obscur et qui devient tout d’un coup limpide, lumineux, simple, évident !
Et nous assistons à cette scène étonnante, Pierre rentre, Pierre le » mythomane » aux moustaches rousses ! Béa comprend alors que non seulement c’est lui, le mari, mais qu’il est aussi le responsable du musée. Sa démarche de la veille était donc une machination ! Ça c’est clair ! Ce qui l’est moins c’est le jeu auquel il se livre ! Et ce qui l’est autant c’est le rôle et le sort de Carole dans tout ce micmac !
– Vous !
Et oui, le « vous » désigne l’imposteur démasqué, mais ce dernier est aussi surpris que Béatrice, ne s’attendant vraiment pas à la trouver ici, l’adresse qu’il lui avait communiquée étant celle d’un comparse. Comme tout bon mâle pris en faute, il pense d’abord s’en sortir en haussant le ton !
– Qu’est-ce que vous fabriquez ici ? Voulez-vous me foutre le camp d’ici et en vitesse !
Martine, elle ne comprend plus rien, et regarde les deux protagonistes avec des yeux tout ronds…
– Ok ! Je me tire ! Avise Béatrice, heureuse d’avoir trouvé la bonne réplique. Mais je vous préviens, il ne va pas être triste mon article !
Elle se dirige vers la porte ! Pierre (mais nous allons l’appeler de son vrai prénom désormais) donc Patrick commence par émettre quelques incompréhensibles borborygmes, puis se rendant compte que la situation lui échappe :
– Attendez, revenez, on va s’arranger !
– Ah je savais bien ! Répond Béatrice, qui du coup revient sur ses pas.
– Quelqu’un peut m’expliquer ce qui se passe ? Essaye d’intervenir Martine, mais personne ne lui répond.
– Bon, je vous avais sous-estimé ! Reprend Patrick, voilà, venez dans mon bureau on va s’arranger.
– Je peux venir aussi demande Martine !
– Mais bien sûr ma chérie, je n’ai rien à cacher !
Du coup Béatrice qui hésitait un peu emboîte le pas du moustachu et tous se retrouvent dans son espace personnel et réservé. Il prend une clé, ouvre un petit coffre mural, sort une enveloppe !
– Je vous donne 20 000 ça ira ?
– Vous voulez m’acheter ? Répond Béa !
– Tout de suite les grands mots, je veux simplement que vous écriviez cet article et comme vous allez l’arranger un peu à ma façon, je vous donne une petite compensation !
– Ah ! Oui ! Ce sont de francs ou des euros !
Patrick réalise que Béa se moque de lui, il ne sait plus comment s’en sortir. Quant à cette dernière elle comprend qu’elle a intérêt à rentrer dans son jeu au maximum.
– Combien vous voulez alors ?
– Un tout petit peu plus !
– 30 000 ?
– Ça ira, mais je veux savoir où est Carole, et je veux que vous m’expliquiez pour quelles raisons vous avez monté tout ce cirque.
– Quelle Carole ? Carole Perrier ? Demande Martine.
– Ah ! Vous la connaissez ? S’étonne Béa.
Patrick n’arrive plus à dominer la situation, il demande à son épouse de se taire, et regardant Béa, se veut implorant :
– Et vous me ferez l’article ? Demande-t-il.
– Ouais !
– Vous me le montrerez avant ?
– Ouais ! Alors, elle est où Carole ?
– A Besançon, elle tient une galerie d’art, tenez voici sa carte, vous pourrez l’appeler, elle n’a jamais disparu !
Une bouffée de colère envers cette fille qui s’était moquée d’elle envahit un moment Béatrice, mais elle se ressaisit :
– Bon, alors maintenant je veux comprendre toute l’histoire !
– C’est tout bête, la gérante de votre hôtel m’a prévenu que des journalistes y étaient descendus. Je me suis dit qu’il serait intéressant qu’ils écrivent un article. Mon plan était simple, d’abord vous faire venir, ensuite créer des conditions pour que vous soyez d’accord pour le rédiger ! Cet article pour moi devait faire un peu dans le sensationnel, j’ai donc rédigé ces petites feuilles avec ces histoires d’enlèvements. Il faut dire qu’au début vous m’avez facilité la tâche ! Pour vous faire venir, j’avais demandé à un copain, un simple prospectus et quelques phrases anodines, et ça vous a intéressé tout de suite !
– Et si ça ne nous avait pas intéressé ?
– Carole devait faire du charme à votre collègue !
– Tous les râteliers ! Décidément !
– Pardon !
– Rien, continuez !
– Ensuite on a eu de la chance, vous avez prévenu la gérante de la date de votre visite. Du coup je me suis empressé d’aller chercher Carole à Besançon et j’ai demandé à Charles, un ami qui me remplace parfois d’assurer le spectacle. Notre objectif était toujours de séduire votre collègue et de l’amener à écrire un article. Puis après les choses ont un peu dérapé ! C’est vous qui êtes monté sur scène… Mais quand j’ai vu comment vous regardiez Carole, je me suis dit » on laisse filer « . On a loué une chambre d’hôtel au cas où… Malheureusement Carole après, elle a un peu déconné ! Quand vous lui avez dit que vous n’étiez pas journaliste, elle vous a cru ! Et elle n’a pas insisté !
Béatrice ne put s’empêcher de ricaner
– Après elle m’a appelé, je me suis dit que c’était foutu ! Repris Patrick. J’ai failli laisser tomber, et c’est quand Carole m’a appris qu’elle avait un nouveau rendez-vous le lendemain avec vous que l’idée m’est venue ! Je lui ai alors demandé de ne pas y aller ! Et c’est à ce moment-là que j’ai eu l’idée de mettre en scène la disparition de Carole ! Il me semblait qu’avec cette nouvelle, ma visite ma petite doc et les fausses pistes que je vous donnais, l’affaire serait empaquetée !
– Vous m’avez pris pour une conne, oui ! Et vous espériez quoi !
– Que l’article soit repris par plusieurs médias, qu’on monte l’affaire en épingle ! Le directeur du musée qui hypnotise ses belles visiteuses pour se les envoyer en l’air, en voilà un bon sujet, en voilà de la pub ! Il y aurait ensuite une enquête, une contre-enquête, on s’apercevait que tout l’article était bidonné, mais ça ne fait rien la pub était faite !
– Et ma carrière était foutue !
– Mais pas du tout, vous auriez été abusé » à l’insu de votre plein gré » !
– Bon, je vous laisse, je vous recontacterais. Je ne recompte pas les sous, j’espère qu’il y a le compte… Quant à vous, Madame, vous êtes charmante, vous avez de bien jolies épaules, et j’aurais bien aimé vous connaître davantage, mais que voulez-vous, on ne fait pas toujours ce qu’on veut !
Une fois à l’extérieur, elle sortit la petite carte de l’atelier de Carole Perrier. Elle composa le numéro, un peu fébrile. Une voix féminine répondait. Béatrice ne prononça pas un seul mot, laissant son interlocutrice répéter plusieurs » Allô ! » avant de finir par raccrocher. Elle était dépitée, plus sûre de rien. Elle composa le numéro de portable de Martinov.
– Allô ! Mon petit professeur ! Tu es toujours à Besançon ?
– Plus pour longtemps, j’attends le car…
– J’ai un petit service à te demander…
Une demi-heure plus tard Martinov rappelait, et précisait à Béatrice qu’il avait bien aperçu Carole en personne dans la galerie en question. Notre héroïne prit alors de nouveau la carte, la déchira en petits morceaux qu’elle éparpilla au vent…
– Salope !
SAMEDI
Le lendemain matin, un taxi qu’ils avaient commandé, les attendait devant l’hôtel pour les conduire à la gare de Besançon. La grosse gérante sembla surprise de ce départ mais remit une enveloppe à Béatrice
– Voilà c’est une personne qui m’a demandé de vous remettre ça, mais seulement le jour de votre départ !
En partant, elle se retourna, la gérante téléphonait… sans doute à Patrick… C’est dans le véhicule qu’elle ouvrit l’enveloppe : Elle reconnut la carte de Carole qui y était jointe et commença à lire :
Bonjour Béatrice, Je ne voudrais passer pour ce que je ne suis pas, et je ne te ferais pas de grands discours ni de grandes déclarations, mais il faut que tu sache que : La relation que nous avons eu ensemble était sincère, même si au départ il s’agissait de comme on dit joindre l’utile à l’agréable… J’ai adoré ce que nous avons fait toutes les deux et crois-moi, je ne suis pas près de l’oublier. Je souhaitais sincèrement te revoir le lendemain, mais j’en ai été empêchée ! Quand je dis » empêchée » je n’ai subi aucune contrainte ni physique ni morale, j’ai simplement accepté à contre cœur de ne pas y aller afin de ne pas contrecarrer les plans d’un ami. Si je t’ai fait de la peine, je te demande de me pardonner, je suis peut-être un peu spéciale, mais je ne suis pas une salope ! On peut si tu le veux, se revoir pour parler de tout ça et plus si tu le souhaites, mais en ce qui me concerne, je ne demande que ça ! Je t’embrasse. Tendrement ! Carole.
Alors Béatrice prit la petite carte et la rangea délicatement dans son portefeuille. Elle afficha un large sourire, ça allait soudain beaucoup mieux !
– Des bonnes nouvelles ?
– Ça va, oui ? Il est à quelle heure notre train ?
– A 11 heures 25
– Hummm, je crois que je vais en prendre un peu plus tard, ça ne te dérange pas, mon petit professeur…
Fin
Précisions » culturelles » La version de Perrault n’est qu’une des nombreuses versions de Cendrillon, on ignore trop souvent que les frères Grimm en ont fait une aussi L’histoire reproduit volontairement la même erreur que toutes les adaptations modernes, Perrault a commis une faute d’orthographe dans son texte écrivant » verre » au lieu de » vair « , le vair étant la fourrure du petit gris (sorte d’écureuil de Sibérie au pelage gris) Le conseil général du Doubs et le conseil régional de Franche-Comté n’ont évidemment jamais subventionné un quelconque musée Cendrillon… mais bon…
Maud-Anne Amaro
– Avril 2002 maud_anne@hotmail.fr
Ce texte a obtenu le 3ème prix Vassilia du « meilleur récit publié sur notre site en 2002