Le blog de vassilia-x-stories
Chanette 11 – Chanette à Lyon 2 – Retour par Chanette
2- Retour
Entracte : Le récit de Viviane
(Bien sûr, chers lecteurs, ce récit ne m’a pas été raconté comme vous allez le lire, les gens racontent très mal et pas forcément dans l’ordre, alors on va dire que j’ai repris la chronologie et que je l’ai enjolivé de quelques chaudes scènes érotiques.)
A 20 ans j’étais étudiante en histoire, j’étais assez délurée, j’allais de mecs en mecs, incapable de me fixer, j’avais pas de mal à trouver, j’étais à l’époque ce qu’on appelle un joli un petit lot… et sans me vanter je n’avais pas grand-chose à faire pour dénicher quelqu’un, j’en jouais et j’en abusais jusqu’au jour où j’ai rencontré Gilles. Comme ça dans une galerie marchande, j’avais acheté un petit pull et je me regardais dans un miroir, c’est son reflet que j’ai aperçu en premier, brun, les cheveux longs, un visage tourmenté, des yeux profonds, un sourire… Je me suis retournée, et je lui ai souri !
– Vous croyez au coup de foudre ? Qu’il m’a demandé.
– Je n’y croyais pas jusqu’à maintenant !
Moins de trois minutes après on se roulait une pelle, une heure après on couchait ensemble, le lendemain on s’est mis en ménage, il était artiste peintre, enfin c’est que ce qu’il disait parce que ses toiles… bon, mais ça se vendait, il lui arrivait de faire le gigolo avec la directrice d’une galerie d’art, ça m’a amusé quelques temps. Il faisait l’amour comme un dieu, ça a été le premier à me donner du plaisir, il m’a aussi appris des tas de trucs que je ne soupçonnais pas, je les ai presque tous accepté.
Mais il faut croire que tout le monde a son côté obscur : Un jour, il a invité quatre copains, parmi ces mecs, il y en avait un, qui me répugnait, peu importe pourquoi, mais je ne le supportais pas. J’étais la seule fille et j’avais peur que cette petite fête se transforme en partouse à cause justement de ce mec. C’est pourtant ce qui s’est passé et on s’est tous retrouvé à poil. Quatre fois, cinq fois, il a fallu que j’écarte ce type !
– Je ne veux pas que tu me touches, j’ai encore le droit de choisir mes partenaires !
J’ai cru qu’il avait compris, il s’est casé dans un coin et s’est contenté de regarder, les autres s’en donnait à cœur joie, mais je n’étais pas passive et je m’éclatais pas mal. Après une pause, Gilles m’a proposé de m’attacher, comme ça, pour le fun, je n’avais rien contre d’autant que j’avais confiance en mon copain. Et c’est là que tout a basculé, j’ai vu le mec dont je ne voulais pas s’approcher, j’ai crié, il a continué, j’ai supplié Gilles de l’empêcher, non seulement, il ne l’a pas fait mais il m’a bâillonné. La suite a été un enfer, j’avais beau essayer de me dire que ce n’était qu’un mauvais moment à passer, ben justement ça ne passait pas bien. J’ai du mal à me souvenir de la suite, on m’a détaché, j’ai fait une crise de nerfs, les mecs se sont engueulés entre eux, l’un des invités, Hugues prenant ma défense. Quand je me suis enfuie, il m’a rattrapé, consolé et a proposé de m’héberger. Le lendemain quand je suis revenue chez Gilles récupérer mes affaires, ce con n’a eu aucun remords, il se justifiait et me reprochait d’avoir manqué d’humanité envers un pauvre type !
Je suis restée près de trois mois avec Hugues, lui aussi faisait dans la peinture. Parfois quand l’argent était bien rentré il ne foutait rien, mais rien de ce qu’on appelle rien ! Je me farcissais le ménage, et tout le reste, et monsieur passait ses journées devant une toile sans à peine y toucher, il pouvait parfois rester une semaine sans se laver, dans ses périodes là, il ne mangeait pas beaucoup, buvait pas mal, devenait grossier et s’endormait en faisant l’amour ! Ça m’a fait réfléchir, je savais que je ne resterais pas avec lui, je savais aussi que je pouvais me débrouiller pour trouver un mec qui soit à la fois mignon et plein de fric. Je n’attendais plus que l’occasion.
Un jour Hugues m’a emmené dans un club échangiste. Je ne connaissais pas, et ça a été ma seule expérience dans ce genre d’endroit. Je suis rentrée avec lui, deux heures après je suis ressortie avec Pierre, qui est devenu mon mari…
Ça faisait à peine une minute qu’on était entré, qu’Hugues me présentait à un couple ! La nana a pratiquement sauté au coup de mon compagnon et je me suis retrouvée avec un inconnu qui s’est mis à me peloter d’abord timidement puis de façon très appuyé, on s’embrasse, on se débraille, j’essaie aussi de prendre des initiatives pour ne pas avoir l’air nunuche, et quand je lui fous la main entre les jambes, il est tout content ! Alors j’en profite et lui ouvre la braguette, j’ignore si je peux aller lui libérer la bête, mais un bref regard circulaire autour de moi me rassure, ce ne sera pas le premier sexe à l’air de la soirée. Je sors l’engin, un bel engin, le tripote un petit peu, puis me penche pour le sucer ! C’est à ce moment-là qu’un type vient en toute décontraction faire la causette avec mon partenaire du moment !
– Bonsoir, je vois que tu es en excellente compagnie ! Je vous offrirais bien la mienne, mais si vous souhaitez ne rester que tous les deux, je n’insisterais pas !
– Moi, ça ne me dérange pas, répond celui que je suçais goulûment, mais il faut demander à mademoiselle !
J’interrompais un instant ma fellation et après avoir jeté un coup d’œil au nouvel arrivant pour vérifier s’il ne s’agissait pas d’un Quasimodo local, je lui notifiais que « la demoiselle, elle n’avait rien contre ! » Quelques instants plus tard, je suçais ma deuxième bite de la soirée, puis je fis dans l’alternatif, l’une puis l’autre. Je capturais un moment le regard du nouveau qui de façon assez surprenante lorgnait sur la bite de son ami avec concupiscence. Une ébauche de plan germa alors dans mon esprit.
– C’est mon jour de chance, dit soudain le nouveau, cet après-midi je me suis fait embaucher chez C… et ce soir je me fais sucer par la plus belle fille de la boite !
Trop bizarre le mec, tout en se faisant pomper, il donnait des détails sur son salaire d’embauche (un très bon salaire) sur ses perspectives de carrières (de très belles perspectives) D’autre types se pointèrent espérant se faire sucer à leur tour mais je leur indiquais par gestes qu’ils n’étaient pas les bienvenus. Ils n’insistèrent pas !
– On pourrait peut-être aller sur les matelas ? Proposa le premier.
– Non, je veux bien baiser, mais pas ici ! Répondis-je
– On va chez moi ? Proposa alors le deuxième ?
Je le regardai alors en face, lui fit un léger clin d’œil.
– Non j’ai envie de finir la soirée en duo, pas en trio ! Pour vous départager je me donnerais au premier qui sucera l’autre !
Il n’a même pas hésité une seconde, il s’est baissé à la vitesse de l’éclair et a gobé la queue de son ami ! Et l’autre de protester en poussant des cris effrayés, pour finir par s’enfuir ! Je suis donc sorti de la boite avec Pierre et nous avons été chez lui, ce soir-là il a perdu un ami, cet imbécile ne lui ayant jamais pardonné cette innocente plaisanterie !
On s’est tout de suite mis en ménage, ce n’était pas le très grand amour, mais cet homme était physiquement charmant et il m’apportait la stabilité et la tranquillité, après tout, c’est ce que je recherchais. On n’est jamais retourné en club échangiste, j’avais l’impression qu’il me couvait, qu’il ne voulait pas que je m’échappe. Il s’affirmait libéré sexuellement mais ne le prouvait pas trop. En fait, il était plus obsédé que libéré.
Il me disait souvent que la vie en couple n’était pas un contrat d’exclusivité sexuelle, et qu’on pouvait s’envoyer en l’air chacun de notre côté sans que ça prête à conséquence. Mais, il se mentait à lui-même. Finalement, il était compliqué, par contre, il n’était pas trop chiant…
Puis, les choses sont allées assez vite, son nouveau travail marchait bien, il a acheté un bel appartement dans Lyon, et on a fini par se marier, à cause des avantages fiscaux, qu’il disait, puis sa carrière a continué de grimper. Je n’y étais pas complètement étrangère. Je me souviens la première fois qu’il a voulu m’impliquer.
– J’ai invité le patron à bouffer samedi soir, il faudra le soigner !
– Ce n’est pas un problème, renseigne-toi sur ce qu’il aime bien manger !
– Oui ! Ils vont désigner un nouveau directeur régional, j’ai mes chances, mais je ne suis pas tout seul…
– On va faire pour le mieux alors…
Je sentais Pierre gêné.
– Oui, mais il n’y a pas que la bouffe, il faut qu’il sorte d’ici enchanté, ravi ! Ce qui m’embête, c’est qu’il viendra seul, et il est un peu obsédé comme mec !
J’avais parfaitement compris où il voulait en venir mais je faisais ma sotte !
– Il est encore plus obsédé que toi ?
– Disons que ce n’est pas vraiment pareil.
– O.K., ce que tu veux, c’est que j’évite de le remettre à sa place s’il devient collant ?
– Ben oui, mais d’un autre côté, j’aurais bien aimé que tu t’habilles un peu sexy.
– Pas évident à gérer, tu veux donc que je l’allume ?
– Oui…
– Et que je le laisse faire, s’il a envie de me tripoter ?
– Jusqu’à un certain point
– Admettons qu’il aille vraiment trop loin et que la situation dégénère, tu devras alors intervenir ?
– Oui !
– Très mauvais pour avoir une promo, ça, le mec qui fait une réflexion désagréable à son patron ! Répliquais-je en prenant un air faussement dépitée.
– Je sais, il va falloir la jouer fine, on va réfléchir…
– Ben, moi, c’est tout réfléchi, si ce mec me manque de respect, je lui en colle une ! Répondis-je.
– Surtout, pas, pour une fois tu peux peut-être prendre sur toi, le jeu en vaut la chandelle, non ?
– Je ne sais pas si je saurais faire ! Ne l’invite pas !
– C’est trop tard, c’est déjà fait !
– Une invitation, ça s’annule, il suffit de trouver un prétexte.
– Mais, Viviane, c’est important pour ma carrière, essaie de comprendre !
Alors j’ai éclaté :
– Ecoute, Pierre tu me dégoûtes, en fait tu t’es dit dans ta petite tête de salopard que si je couchais avec ton patron, ta promo était dans la poche, c’est bien ça ?
– Viviane !
– Alors, pourquoi tu ne me le demandes pas carrément. Je ne te savais pas aussi retord ? Alors je vais te dire un truc : ton boss, j’en fais mon affaire, non seulement, je ne vais pas le renvoyer dans ses cordes, mais je vais me laisser faire… Jusqu’au bout s’il le faut… Mais si tu as cette promo, je saurais te rappeler aussi souvent que nécessaire que c’est grâce à moi que tu l’as eu !
– Viviane !
– Quoi Viviane ? Je sais très bien ce que je fais, ce n’est pas innocent, j’espère bien y trouver mon compte…
Je l’ai planté là, jugeant inutile de continuer à discuter. Son patron était en fait beaucoup plus correct que ce qu’avait voulu me faire croire Pierre, il n’a eu aucun geste déplacé, ni aucune parole équivoque. N’empêche que je l’ai allumé…
Nous l’avions reçu dans l’intimité, ayant libérée la cuisinière, et j’accomplissais mon rôle de maîtresse de maison, servant et desservant les plats. Le boss semblait fasciné par mon décolleté ! Normal c’était le but de l’opération ! Un moment je le frôlais presque…
– Décidemment, la naissance de ma poitrine vous attire ! Mais ce n’est pas un reproche, j’aime qu’on me regarde et j’ai la chance d’avoir un mari qui n’est pas jaloux du tout…
– C’est bien malgré moi… mais que voulez-vous la nature humaine…
– Ne vous gênez pas ! Regardez, on va jouer à un petit jeu…
Je pris sa serviette et la fit tomber à terre !
– Oh, la vilaine serviette ! Elle est tombée, je vais la ramasser !
Je m’accroupis près de lui !
– Comme ça vous pouvez voir encore mieux !
– Vous allez me faire perdre la tête !
– Qu’importe, on ne vit qu’une fois !
Ma main est sur sa cuisse, elle se fait insistante !
– Placez votre main sur mon décolleté, rien qu’un instant !
– Que dois-je faire, Pierre ! Lança-t-il à mon mari !
– Vous avez ma permission, regarder mon épouse est aussi un de mes plaisirs favoris…
– Alors dans ce cas…
Il me caresse le haut de mes nichons avec deux doigts.
– M’autorisez-vous à aller un peu plus loin ?
– Vous caressez si bien que je peux décemment refuser ! Répondis-je hypocritement.
Il s’emballe, me sort les tétons, me les tripote, je le laisse faire un instant tandis que ma main a pris possession de sa braguette toute dure, je me place entre ses cuisses, libère sa bite l’engloutit et la suce avec application. Cinq minutes plus tard il éjaculait dans ma bouche.
Bref, mon mari a eu sa promo !
Ce con de patron a cru que j’avais fait ça pour ses beaux yeux, il a voulu absolument me revoir. Je n’ai pas à l’époque, trouvé les mots pour m’en sortir, et j’ai dû supporter les assiduités de ce type pendant plusieurs semaines avant de pouvoir m’en débarrasser.
Quand, Pierre m’a un jour demandé de recommencer avec un autre, il l’a fait cette fois carrément, je n’ai pas refusé. Je me suis rendue compte qu’il était inutile d’en faire de trop, qu’il ne fallait surtout pas faire imaginer à ces types que la partie de sexe était inéluctable, et aussi qu’une fois dans le vif du sujet qu’il n’était pas nécessaire de faire durer la chose. Il y a dans ces coucheries une bonne part de mental, et pour beaucoup le fait de s’être envoyé la femme de Pierre suffisait à leur bonheur, surtout si la chose ne paraissait pas si évidente que ça, et quelle que soit la durée de la « prestation ».
Pierre continuait à grimper dans les sphères hiérarchiques, et notre niveau de vie est devenu impressionnant. Je pouvais me payer tout ce que je voulais. Au début j’en jouissais, jusqu’au jour où je me suis aperçue qu’il n’y avait pas que ça dans la vie ! Je voulais un enfant, il ne voulait pas en entendre parler. Et puis notre vie sexuelle était devenue d’un triste… Au début, Pierre vivait dans ses fantasmes et voulait me les faire partager. L’un de ses trucs c’était de me voir faire l’amour avec une femme, un jour il a pour ça loué une call-girl, mais l’expérience a été décevante, la fille n’était même pas sympa. Par contre, une autre fois, je me suis envoyée en l’air avec la femme de l’un de ses chefs, c’était grandiose, une femme superbe, avec une chute de rein impressionnante, j’ai encore le souvenir de la douceur de sa peau et celui du goût de son sexe ! Une autre fois, il a voulu qu’on visionne ensemble une cassette de cul, il y avait une fille qui était attachée et qui se faisait fouetter, pincer. Ça m’a pris la tête, rappelé trop de mauvais souvenirs, j’ai été me coucher et je l’ai planté là ! Il est revenu à la charge quelques temps après, j’ai compris alors qu’il aurait voulu me faire la même chose qu’à la nana du film ! Ça va pas la tête ? Quelques petites fessées à la limite c’est rigolo, mais depuis la partouze chez Gilles, je ne supporte tout simplement plus qu’on envisage de m’attacher !
Le temps a passé et je m’ennuyais, Pierre ne s’occupait plus trop de moi, se contentant de me faire l’amour comme un sauvage en moins de cinq minutes quand ça le prenait. Il avait depuis longtemps arrêté de faire du sport, son seul passe-temps était de suivre les grands prix de formule un. Tous les ans on allait à Monaco, pour voir la course, moi je trouvais ça gavant. A part cette fantaisie, il ne vivait que pour le boulot. Il était en ascension permanente, on a acheté cette baraque dans la banlieue chic de Lyon, lui, travaillait à Paris la semaine et il ne rentrait que le week-end. Déjà qu’avant on ne se voyait pas souvent…
Alors, un jour je lui ai dit sur le ton de la boutade que j’allais prendre un amant. Il a pris ça au premier degré et m’a simplement demandé de lui raconter… C’est à partir de ce moment-là qu’il a commencé à me narrer par le détail ses frasques avec ses secrétaires. Moi je lui disais que je n’avais rien à lui dire, mais l’idée était dans l’air, j’ai alors décidé de prendre un amant, ça a été facile, ça m’a rappelé ma jeunesse, je me suis laissée draguer trois fois en une après-midi. J’ai amené le premier puis le deuxième au bistrot. Je ne cherchais pas un apollon mais quelqu’un qui puisse me sortir, me distraire, avoir des conversations intéressantes. Les deux premiers ne firent pas l’affaire, le troisième fut le bon. Et une heure plus tard on baisait comme des dingues ! J’ai voulu me donner à fond, allant même jusqu’à exiger qu’il m’encule…
Notre liaison a duré trois ans, il possédait un petite boutique qui vendait des appareils photos et qui faisait du développement, on se voyait le midi pendant la fermeture du magasin souvent pour baiser, mais d’autres fois on allait au restaurant, et parfois même on ne faisait rien d’autre que d’aller papoter dans un jardin public en grignotant une crêpe ! Bref : le bonheur.
Un jour il m’a confié que sa situation familiale se dégradait, j’ai cru qu’il lançait un ballon d’essai pour pouvoir casser notre liaison, mais c’était le contraire, il cherchait à me faire rompre avec mon époux. Je n’avais pas pris un amant pour ça, mais pour la première fois l’idée germait. Quelques semaines plus tard, il m’apprit que sa femme était partie. Pour la première fois, j’ai donc été chez lui, et là j’ai manqué de courage, quand j’ai vu ce minuscule appartement pauvrement meublé, je me suis rendue compte de tout ce que je risquais de perdre. J’ai prétexté un manque de forme pour éviter de faire l’amour, et lui pendant ce temps-là me faisait part de ses projets de s’installer à Nice. J’ai fini par partir, lui disant qu’on ne se reverrait sans doute plus, je l’ai laissé désemparé, pour la première fois de ma vie mon attitude m’a dégoûté. Je me suis traité de salope, dans le mauvais sens du terme.
(Viviane se met à pleurer, il manquait plus que ça, je ne sais pas quoi lui dire, cette fille est trop loin de mon monde, pourtant ce récit que je n’avais accepté d’écouter que par « obligation » finit par m’intéresser. Viviane derrière ses certitudes, c’est un être humain, une femme sensible, écorchée, pleine de contradictions comme beaucoup. Je lui tends un kleenex.)
Mon mari a ensuite été nommé à Londres, c’est probablement le sommet de sa carrière, il n’ira pas plus haut. Les parties avec les gens de sa boite se sont raréfiées. Par contre, le vendredi soir ou le samedi soir j’avais parfois droits aux clients… En cas de signature, Pierre recevait une prime assez coquette, dans ce cas la moitié était pour mon argent de poche. Ce n’est pas évident, ma jeunesse est dernière moi, et Pierre avait le budget pour leur payer des escortes girls de haut vol, mais là encore c’est psychologique, baiser la femme de monsieur D. c’est pour eux un « plus ». Encore faut-il ne pas le faire n’importe comment, ce n’est pas une nymphomane qu’ils veulent, c’est une bourgeoise, et il faut leur donner l’illusion que le sexe n’était pas forcément obligatoire. Dans l’ensemble ça ne se passait pas trop mal. C’était souvent une corvée, mais bien rétribuée… Jusqu’au jour où il y a eu les japonais ! Toutes les conversations étaient en anglais, et moi je ne le parle pas. Ils me paraissaient très corrects, mais quand j’ai commencé à les chauffer, c’est devenu vite limite, ils étaient visqueux, et quand on s’est installé sur le canapé, ils se sont crus tout permis, je n’étais plus une femme, mais une poupée gonflable, ils n’avaient aucun respect, foutaient leurs doigts partout. Je n’ai rien dit, Pierre m’avait confié que le contrat était énorme, jusqu’au moment où j’ai compris qu’ils voulaient m’attacher, j’ai croisé le regard de mon mari, il était blême mais j’ai réalisé qu’il n’interviendrait pas… Alors j’ai crié, je me suis dégagée et j’ai été m’enfermer dans ma chambre. J’ai su après que Pierre les avait emmenés dans une boite à Lyon pour qu’ils puissent tirer leur coup.
Pierre a eu l’intelligence de ne me faire aucun reproche, mais plus tard, je lui ai dit que c’était fini, que s’il voulait offrir du sexe à ses clients pour signer des contrats il fallait que ça se fasse en dehors de la maison. On s’est engueulé ! Il a passé outre, et s’est ramené avec deux allemands quelques semaines plus tard, j’ai pris la bagnole et je suis partie coucher à l’hôtel… Il m’a foutu la paix avec ça pendant presque un an.
Et voilà qu’il y a un mois, il a commencé à me parler d’une nouvelle secrétaire…. Or quelque chose ne collait pas, c’était la première fois qu’il invitait quelqu’un, comme ça sans arrière-pensée apparente, pas de calculs, pas de contrats, rien, non il invite la belle et gentille prétendue secrétaire, pour partouzer à trois, avec moi… alors qu’il passe tous ces week-end à bosser sur son ordinateur et à passer des coups de fil à droite à gauche…. Ça ne tient pas debout ! Et puis il m’en parlait de ses secrétaires et des autres nanas de son travail. Je connais les noms de toutes, je m’en fous qu’il couche avec, puisqu’il parait que nous sommes un couple très libre. Mais il ne me parlait pas de vous de la même façon, ça restait très discret comme quand on parle d’un personnage mystérieux, et surtout il n’y avait jamais aucun lien entre son travail et vous. J’en ai conclu que vous n’étiez pas du tout sa secrétaire et que vous vous étiez connus à l’extérieur ! J’avais prévu une série de questions piège pour vous confondre, deux ont suffi !
– Je vous ai dit qui j’étais !
– Dites-moi la vérité !
Idée, je sors mon portefeuille, je dois avoir une petite carte de visite avec mon téléphone !
– Faites ce numéro là : c’est mon répondeur ! Vous reconnaîtrez ma voix !
– Et qu’est-ce qu’elle dit votre voix ?
– Rien d’explicite, mais on comprend bien que je ne suis pas importatrice d’arachides…
Et puis j’en ai une d’idée encore meilleure, j’attrape mon sac de voyage, je lui ouvre devant le nez, et lui montre le contenu, un martinet, une cravache, de la corde, et surtout et c’est sur cet objet qu’elle fait des yeux tout ronds, un gros gode ceinture !
– Je n’y comprends plus rien ! S’exclame-t-elle ! Et puis, pourquoi vous êtes-vous sauvée ? Quoi que ça y est, j’ai compris, il vous a demandé de me faire quelque chose de particulièrement odieux, et au dernier moment vous vous êtes dégonflée ?
– Il ne m’a rien demandé d’odieux, il m’a demandé de vous dominer, et notamment avec les petits joujoux que j’ai dans mon sac ! Or j’ai un principe, je ne domine jamais quelqu’un sans son accord. Quand je domine des couples, je fais très attention de savoir si la femme est d’accord, vraiment d’accord. Luc, Pierre pardon, m’avait assuré que vous seriez consentante. Or, il m’a menti sur ce point. Je n’allais donc pas rester.
– Mais vous n’allez pas avoir des ennuis avec votre agence ?
– L’agence ? Quelle agence ?
– Vous faites bien partie d’une agence ?
– Pas du tout, je travaille toute seule et pour moi !
– Mais, il vous a trouvé comment ?
– Je passe des annonces !
– Ah ! Dit-elle.
Elle semble paumée, ayant du mal à rassembler les pièces de ce puzzle. Je la comprends, moi aussi des choses m’échappent dans cette salade.
– Quelque chose ne colle pas, reprend-elle, récapitulons, Pierre choisit une fille, donc c’est vous, il vous demande de venir m’attacher, vous lui dites que vous ne le ferez que si je suis d’accord, et il vous fait croire que je le suis, c’est bien ça ?
– Ben oui !
– Il savait que vous étiez prête à vous sauver si je n’étais pas d’accord ?
– Peut-être pas, non !
– Il devait penser qu’une fois ici, vos réticences tomberaient…
– Possible, mais moi je pense à pire, ça s’appelle comment quand on attire quelqu’un quelque part en lui mentant ?
– Un guet-apens, non ?
– Oui, l’important était de me faire venir ici, la suite ça peut être n’importe quoi, y compris…
Je laissais volontairement ma phrase en suspens, ne sachant si je devais exprimer la totalité de ma pensée.
– Y compris quoi ?
– Vous savez, on ne sait jamais ce qui se passe dans la tête des gens. L’homme est un être fragile, il suffit de pas grand-chose parfois pour qu’il pète les plombs. .
– Vous pensez qu’il voulait vous faire quelque chose contre votre volonté ?
– Il devait avoir un plan, un scénario… Et à partir de ce moment-là, on peut imaginer n’importe quoi : qu’il vous utilise contre moi, mais je ne vois pas bien le mobile, qu’il m’utilise contre vous, c’est déjà plus plausible, ou des choses encore plus compliquées.
– Vous utiliser pour me faire quoi par exemple ?
– Vous savez on peut tuer quelqu’un pendant une séance S.M., c’est même d’une simplicité stupéfiante. Et pour la police c’est un accident ou au pire de l’homicide involontaire…
– Quoi ? Vous prétendez que Pierre… Vous n’avez pas le droit de dire ça !
– Alors, je n’ai rien dit !
Elle ne parle plus ! J’y ai été fort, mais autant qu’elle regarde la réalité en face ! Elle se lève sans un mot, va s’asseoir quelques sièges plus loin, mais reste dans mon champ de vision, elle sort son téléphone portable et rouspète, sans doute parce qu’elle n’obtient pas le numéro qu’elle souhaite ! Elle finit par le ranger, puis essaie de s’intéresser au paysage qui défile ! Curieuse bonne femme ! Je suis persuadée qu’elle va se repointer devant moi dans les cinq minutes !
Ça ne loupe pas : la revoici, la revoilà !
– Vous pensez vraiment ce que vous avez dit ?
– Oui, mais ce n’était qu’une idée, qu’une hypothèse, si ça trouve je suis complètement à côté de la plaque…
– Pourquoi voudrait-il me tuer, s’il ne veut plus de moi, je lui ai déjà dit que foutre le camp n’était pas un problème…
– Justement, il n’a tout de même pas fait venir exprès une fille de Paris, pour vous virer… c’est donc qu’il y a autre chose !
– On ne saura jamais ! Qu’est-ce que j’ai été gâché ma vie avec ce type ! Soupire Viviane.
Nouveau silence, mais cette fois elle reste à sa place ! C’est moi qui l’ai relancé !
– Vous allez faire quoi maintenant ?
– Je vais aller chez ma sœur, mais pour l’instant je n’arrive pas à la joindre…
– Et après ?
– On a une baraque à Deauville, j’ai pris les clés, je m’installerais là-bas, en attendant d’y voir plus clair !
– S’il en a après vous, il ne vous lâchera pas, moi je serais vous je me méfierais, et je me planquerais, les gens qui échouent dans des plans tordus, la plupart du temps ils reviennent à la charge !
– Arrêtez, vous me faites peur !
– J’ai aussi l’impression que votre mari cherchera à me revoir, et très rapidement, lundi ou mardi !
– Le mardi ça m’étonnerait, il travaille à Londres, par contre le lundi il a sa réunion à Paris…
– Effectivement c’est le lundi que je le voyais…
La tête de Viviane !
– Vous le connaissiez d’avant ?
– C’était un de mes clients réguliers depuis plusieurs mois !
– Hein ! Mais c’est quoi ce cirque, pourquoi mon mari paierait pour baiser alors qu’il tombait toutes les secrétaires de son boulot ?
– Heu, ça n’a rien à voir !
– Ah bon, je voudrais bien comprendre !
– Il n’y a rien à comprendre, je n’essaie pas de savoir ce qu’il y a dans la tête de mes clients, je ne suis pas là pour ça ! Ce que j’essaie de vous faire comprendre, c’est que vous êtes peut-être en danger. Si Lundi j’en apprends plus, je pourrais vous le dire, mais laissez-moi votre numéro de portable !
Elle me l’a communiqué, puis elle a voulu me payer un verre au bar ! Avec tout ça, le temps passe vite. Dans quarante minutes nous seront à Paris, mais ça n’empêche pas de se dégourdir les jambes !
– Et cette histoire de vouloir nous faire coucher ensemble c’était quoi ?
– C’est un fantasme masculin ultra courant, il m’a dit ça pour rendre le week-end plausible, je suppose… et idem en ce qui vous concerne.
– C’est vrai que ça fait une éternité que je ne me suis pas envoyée une bonne femme !
Comment qu’elle cause !
– Confidence pour confidence, moi ça m’arrive de temps en temps, et ça ne me déplaît pas du tout !
– C’est vrai que ça change ! Vous auriez fait l’amour avec moi ? Demande-t-elle
– Je pense que je n’y serais pas allée à reculons, vous avez un très beau sourire !
– Arrêtez, vous allez me faire rougir ! Je vais vous dire, je vous ai dit ce matin que vous n’étiez pas du tout mon genre… mais j’ai dit ça par pure méchanceté, en fait dans des circonstances disons… normales, je me serais probablement laissé faire ! Laissez-moi vérifier quelque chose !
Incroyable, la nana me met sa main sur la mienne et la caresse… Que voulez-vous que je fasse, je ne vais pas faire un scandale pour une caresse de la mimine.
– Vous avez la peau très douce, j’en étais presque sûre !
– Elle est douce partout ! Répliquais-je consciente de jouer avec le feu !
– Il parait que la mienne est douce aussi !
– Je veux bien le croire, vous caressez bien…
– Je caresse bien partout ! répondit-elle me renvoyant la belle de fort belle manière !
– On retourne s’asseoir ? Proposais-je !
Ouf, j’ai cru un moment qu’allait se rejouer le trip dingue de l’aller ! Viviane reprend son portable, n’obtient toujours pas son numéro, en fait un autre. Finalement je comprends qu’elle téléphone à sa mère…
– C’est bien ma veine, ma sœur est partie en vacances en Espagne, je n’ai plus de point de chute !
– Vous trouverez bien un hôtel !
– Un hôtel, mais je ne veux pas aller à l’hôtel !
– Attendez, il y a des bons hôtels à Paris quand même !
– Vous ne comprenez pas, je ne veux pas rester seule ce soir… surtout après ce que vous m’avez dit tout à l’heure !
– Je suis désolée mais je n’ai pas de solution !
– Vous ne pourriez pas m’héberger, juste pour cette nuit, je peux coucher par terre, ça me rappellera ma jeunesse.
– J’ai un canapé !
Je réalise que je viens de faire une gaffe !
– Merci, merci, beaucoup, vous êtes vraiment super sympa, je saurais vous remercier !
Holà ! Qu’elle n’en jette plus et d’ailleurs je n’ai même pas dit oui !
– Permettez que je vous embrasse !
Là encore je n’ai donné aucune permission, premier bisou sur la joue gauche, le deuxième à quelques millimètres de ma bouche, elle reste collée, j’ai compris, et j’ai bien voulu me laisser faire, la voici qui me fout sa langue dans la mienne. Un bref patin plus symbolique qu’appuyé ! Les choses se compliquent, je suis sûre qu’elle veut s’envoyer en l’air, le problème c’est que si une relation avec elle ne m’aurait en rien déplut, elle ne m’attire pas spécialement non plus… Et puis chez moi il y aura Phil… Merde je ne l’ai pas prévenu !
– Euh, je n’habite pas seule !
– Un copain, une copine ?
– Mon mari !
– Ah ! Excusez-moi, mais j’espère ne pas le déranger. De toute façon demain à l’aube je vous laisserais ! J’aimerai simplement qu’on puisse encore causer un peu ce soir si j’en sens le besoin…
Elle me propose d’appeler Phil pour le prévenir, mais je ne fais pas, je fais ce que je veux et j’emmène qui je veux à la maison (en fait pratiquement personne à part mon cercle restreint de copines, mais bon…)
Paris
J’ouvre ma porte, fais entrer Viviane, un beau bordel dans la cuisine, des verres pas rangés dans le living…
– Il y a quelqu’un ?
Et voilà Phil qui se pointe complètement à poil, il a l’air très embêté !
– Mais enfin Chanette… Oh pardon madame !
Il se met pudiquement sa main sur le pubis pour cacher son sexe, c’est assez grotesque !
– Chanette, je suis désolé, je ne pouvais pas savoir que tu écourterais ton déplacement, je… je… je ne suis pas tout seul, il y a quelqu’un dans la chambre… je ne sais pas quoi te…
– Je serais mal placée pour te faire la morale ! Je reviendrais donc comme prévu demain vers 20 heures, fais en sorte que la maison soit propre.
– Ne m’en veux pas Chanette… je…
– Laisse tomber, demain soir tout ira mieux ! Amuse-toi bien ! Venez Viviane…
Dans l’escalier je craque, trop de choses accumulées et là c’est le pompon ! Mais que dire ? Notre couple s’est toujours prétendu libre, sans pour que cela nous en abusions, mais entre faire le zouave avec des amis après avoir bu un petit coup, et retrouver son mari en plein milieu du week-end chez soi avec une pétasse, il y a une différence !
– Tous les hommes sont décidément des salauds ! Croit-elle intelligent de me dire.
– Ce n’est pas si simple ! Bon tu sais ce qu’on va faire ! Proposais-je me mettant à la tutoyer, on va aller boire un verre quelque part ou plutôt manger un morceau et après on ira se prendre une chambre d’hôtel toutes les deux, et si tu veux encore m’embrasser, je te promets de me laisser faire…
Pierre
Il émerge en fin d’après-midi, il se demande d’abord ce qui se passe, puis tout lui revient, son plan qu’il trouvait génial mais qui s’est écroulé, sa femme en fuite et Chanette envolée. Sa gorge est sèche, il est à deux doigts de tendre sa main vers la bouteille de whisky, mais il résiste… C’est donc comme ça qu’on devient alcoolique, par ce qu’on n’est pas capable d’assumer une énorme déception ? Il se dirige vers la salle de bain, attrape un verre à dent qu’il remplit d’eau et boit. Maintenant, faire face, ou alors trouver un dérivatif ! Il retourne à son bureau, les notes pour le contrat avec les polonais sont toujours là, ça le démoralise ! Alors agir, il ira voir Chanette lundi, essayer de rattraper le coup, les meilleures négociations ne se font-elles pas en tête à tête ? Déjà il sait ce qu’il lui faudra dire, ça va donc mieux… Sauf quand il réalise qu’il ne sait pas comment occuper son temps jusqu’à lundi ! Se servir de ses relations personnelles pour localiser l’adresse privée de Chanette ? Pas si évident surtout un samedi tantôt ! Et si elle travaillait le dimanche ? Après tout voilà qui n’a rien d’absurde, si elle est maquée, son protecteur voudra sans doute récupérer le manque à gagner en l’obligeant à faire des heures sup ! Demain matin, il prendra le T.G.V. pour Paris, il se rendra chez elle, puis après, il trouvera bien à s’occuper, le soir il ira à l’hôtel et le lundi matin, il se rendra comme toutes les semaines à sa réunion parisienne. Et puis si elle ne travaille pas le dimanche, et bien, il lui parlera le lundi !
Sa soirée fut un cauchemar, incapable de suivre ce qui passait à la télé, ressassant sans cesse les événements de la journée, n’arrivant ni à assimiler ni à comprendre sa déconvenue. Sa nuit ne l’apaisa pas, ne trouvant pas le sommeil, il se résolut à quatre heures du matin à se lever, puis à se préparer. Il faillit dans un moment de lucidité renoncer à ce déplacement dominical. Pourquoi prendre le risque de se casser le nez un dimanche, alors qu’il était quasiment certain de la trouver lundi ? Il finit par se dire que le simple fait de ne pas savoir comment occuper sa journée à Lyon était une raison suffisante, il prit alors sa voiture jusqu’à la gare !
Chanette et Viviane
Du coup, elle tombe très bien, la Viviane ! Je ne sais pas trop ce que j’aurais fait si j’étais rentrée seule chez moi, sans doute me serais-je réfugiée chez une de mes amies, je n’en ai d’ailleurs pas tant que ça, mais ça m’aurait coûté d’être seule, j’ai beau me dire que je ne suis pas jalouse et qu’avec le métier que j’exerce, je serais mal venue de l’être, n’empêche que retrouver Phil comme je l’ai retrouvé, m’a contrarié. On ne se refait pas !
On est allé se bouffer une pizza au quartier latin, elle a continué à me parler, c’est fou ce que les gens qui ont envie de se confier peuvent répéter plusieurs fois la même chose. Elle était aussi curieuse de mes activités, me posait des questions auxquelles je répondais parfois de façon précises, parfois de façon beaucoup plus évasive, il y a des choses qui ne la regarde pas, on s’est ensuite un peu baladé dans les rues avoisinantes avant d’aller à l’hôtel. C’est elle qui s’est occupée de tout, c’est elle qui a choisi le lieu, c’est elle aussi, qui quand le réceptionniste lui proposa une chambre avec deux lits jumeaux répliqua qu’elle préférait un grand lit pour deux personnes…
A peine dans la chambre, elle disparaît dans la salle de bain sans en fermer la porte, je l’entend pisser puis se laver les mains, avant de me laisser la place, elle me regarde uriner, puis m’essuyer sans aucune gêne, puis revenant dans la chambre, elle retire le couvre-lit d’un geste nerveux.
– Alors on se gouine ? Dit-elle, sa valise à peine posée.
J’ai toujours apprécié le romantisme.
– T’as vraiment envie ? Lui demandais-je avec un petit sourire.
– Oui, oui, j’ai vraiment envie, tu sais c’est comme au cinéma, tu te demandes si tu as vraiment envie de voir un film, puis tout d’un coup tu as super envie de le voir ! Et toi ?
– Approche-toi au lieu de discuter !
– Tu ne veux pas que je me déshabille d’abord ? Propose-t-elle
– Approche-toi, j’ai dit ! Je vais te croquer le museau !
Elle s’affale sue le lit, sur le dos :
– Viens me chercher ! dit-elle.
Voilà qui dérange mes habitudes, j’adore les longs préliminaires en position debout, j’ai failli lui demander de se relever, mais je me reprends, la rejoins, j’ai peut-être en ce moment plus envie de m’amuser que de faire l’amour, parce que je prends conscience que je n’ai pas véritablement envie d’elle. Bien sûr, elle a une jolie frimousse, bien sûr, elle est bien foutue, mais il manque le petit plus, la petite étincelle. J’espère aussi que rien dans son comportement ne me ferait me bloquer complètement. Arrête de gamberger, Chanette, me raisonnais-je ! Mon visage s’approche du sien, elle entrouvre les lèvres laissant la place à ma langue, mais je la bluffe et lui fait un chaste bisou sur le bout du nez :
– J’aime bien ton nez !
– Embrasse-moi ! Supplie-t-elle.
Je n’en fais rien et lui gobe le nez !
– Lève-toi et viens !
Je ne saurais dire pourquoi sa position me gêne, sans doute parce qu’autant je préfère les hommes couchés, parce que j’aime dominer, autant je trouve que la femme qui se dévoile est plus belle en position verticale !
– Pourquoi, on n’est pas bien sur le lit ?
– Si, mais…
Et puis, je laisse tomber, elle veut faire ça à sa façon, alors allons-y ! Je reprendrais l’initiative quand je le déciderais.
Alors j’envoie valser ma veste sur le fauteuil, puis m’installe à côté d’elle sur le flanc, je la regarde un moment, nous échangeons nos sourires avant de nous retrouver bouches soudées, langues mélangées et lèvres baveuses. L’étreinte dure, c’est qu’elle en veut la bourgeoise ! Imperceptiblement, nos positions se sont substituées. Viviane m’a poussée, me faisant me mettre sur le dos, et tandis que le baiser se prolonge, ses mains empaument mes seins par-dessus le tissu comme pour en prendre possession, puis les voilà sous l’étoffe me caressant le haut du ventre avant de rencontrer mon soutien-gorge, dont elle fait sans préavis sauter le bonnet gauche. Caresse ! Douce caresse ! Je vais pour lui dire que je vais enlever tout le haut, mais c’est inutile, madame s’occupe de tout. Me voici sans m’en être complètement rendue compte, dépoitraillée, débraillée, mon haut remonté sous le menton, le soutif légèrement en dessous, les seins offerts, ses doigts passent sur les tétons, me les serrent timidement…
– Plus fort !
Elle me sourit, voulant sans doute dire qu’elle a compris le message, mais c’est à peine si elle augmente la pression, j’hésite à lui répéter car la caresse si elle est insuffisante n’en ait pas moins efficace, l’excitation me gagne au physique comme au mental. Je ne sais pas quoi faire de mes mains, je lui caresse les cheveux, mais y renonce aussitôt, trop de laque. Je m’amuse de me laisser peloter par cette femme qui exécute son tripotage-débraillement comme le ferait un homme, grosse attention sur les seins avant d’attaquer l’étage inférieur. Les doigts de sa main gauche ont quitté mon sein droit qui est à présent la cible de sa bouche ! Oh la, la, c’est que ça devient sérieux, la voilà qui aspire, qui lèche, qui suce, qui mordille même avec une énergie surprenante. J’ai vraiment en ce moment l’impression qu’elle attendait une situation comme celle-ci depuis des lustres ! Semblant rassasiée de ce sein, elle attaque l’autre et lui fait subir le même traitement… Envie de me toucher… envie de la toucher… Je deviens humide ! J’essaie de dégager mon pantalon, mais la position est mal pratique.
– Il faut que je l’enlève !
– Que tu enlèves quoi ?
Obligée de lui expliquer. Je le dégrafe moi-même, mais c’est elle qui me le retire, découvrant mon string… Et son humidité !
– C’est moi qui te fais cet effet là ?
Je lui signifie de la tête qu’oui, c’est bien elle qui me fait cet effet là, et cette réponse semble envahir son visage de bonheur.
– Pourtant tu dois en voir…
Manifestement elle n’a pas tout compris mais qu’importe…
Sa main explore ma « zone culotte », en caresse alternativement le tour puis le dessus, elle se demande si elle doit l’écarter ou le faire glisser, finalement elle l’écarte, ses doigts s’aventurent sur ma fente mouillée. Envie de lui dire de se foutre à poil, mais j’y renonce, on a le temps ! Son index glisse dans mon intimité, doucement puis imprime un rapide mouvement de va-et-vient, un second doigt entre en piste, son pistonnage finit par produire un assez peu érotique bruit de floc-floc. Elle me dilate de plus en plus… Combien de doigts m’a-t-elle fourré ? Je me redresse un peu, il me semble bien que toutes les phalanges sont entrées ! Je n’y crois pas, la bourgeoise est en toute simplicité en train de me fister. Rien que l’idée m’excite, et puis on ne me l’a pas fait souvent, non pas que j’ai quelque chose contre, mais simplement parce qu’avec mes partenaires, nous faisons d’autres choses. La dilatation est à son comble, j’halète, je geins, je me trémousse, incapable de faire autre chose que de subir, passive, les ondes de plaisir qui ne cessent de m’envahir. L’orgasme m’a pris par surprise, d’ordinaire je le sens arriver, et peux essayer de le retarder. Pas là, me voici propulsée dans les nuages, je suis bien terriblement bien, l’espace d’un instant disparus les étranges scénarios de monsieur Luc, disparu Phil et le « coup de salaud » qu’il m’a fait ce week-end, la seule réalité que je perçois en ce moment divin est le visage de mon improbable amante qui me regarde avec une sorte de mélange de tendresse et de volupté. Et voilà que cette grande saucisse se met à verser une larme. Elle veut me dire quelque chose… Trop tôt, beaucoup trop tôt. Vite, reprendre l’initiative ! Et dans ces cas-là, c’est facile, c’est même d’une simplicité déconcertante. Mon visage s’approche du sien, elle ne refuse pas, bien sûr, le baiser que je lui offre, et cette fois c’est moi qui le prolonge…
– Si tu te mettais à poil ? Proposais-je
– J’allais le faire !
Son déshabillage n’a rien d’érotique, on dirait que quelque part ça la gêne… Une fois fini, elle me fait face :
– Voilà, c’est les restes de la jolie Viviane, qu’est-ce que tu veux, on ne peut pas rester un petit lot toute sa vie ! Tu as le droit d’être déçue, je ne serais pas vexée !
C’est quoi ce mélodrame qu’elle nous fait, bien sûr qu’elle n’a plus 20 ans, n’empêche que beaucoup de femmes pourraient lui envier ce corps qui a su rester désirable.
– Viens ici au lieu de dire des conneries !
– C’est vrai, t’es pas déçue ?
– Bon, alors tu viens ?
La voilà, je la caresse un peu partout éprouvant la douceur soyeuse de sa peau, je lui empaume les seins, je les trouve charmants, ni trop gros, ni trop petits, et leurs petits bourgeons fripés sont restés couleur de rose, je les mordille quelques instants afin de les réveiller, ça marche plutôt bien, déjà, elle émet des petits soupirs, je ne m’éternise pas, et descend mon visage à hauteur de son sexe. Je m’en doutais, elle est trempée. Elle m’a vu venir et a écarté ses cuisses, du coup je les lui caresse tendrement avant de déposer un baiser sage sur ses chairs intimes. L’eau à la bouche… Envie de lécher, ce doit être un réflexe, mais auparavant j’ouvre ses chairs, j’ai toujours été passionnée par le sexe féminin, cela peut paraître une évidence mais il n’en existe pas deux pareils, et chacun est nouvelle découverte ! Il faudra un jour que j’essaie de compter avec combien de femmes j’ai fait l’amour, j’ai beau me dire qu’il n’y en a pas tant que ça, ça fait quand même du monde, du monde et des chattes, la très grande et sombre de Clara, la petite et toute rose d’Anna Gaëlle… Et celle-ci me plaît bien, les grosses lèvres sont gonflées d’excitation et luisantes de mouille, j’écarte tout ça, j’ose un doigt, le ressors trempé, le pose sur son clitoris que j’agace un moment, elle geint.
Allez, cette fois ma langue entre en action, un grand coup pour parcourir tout ça, je m’excite rien qu’à l’idée de savoir ce que je veux faire et ce goût de sucré salé m’enivre, je lèche, je lèche encore et pendant ce temps mes mains vont partout. Les caresses de Viviane sont devenues furtives, en fait elle semble s’abandonner, je suis alors d’autant plus surprise quand elle me demande à brûle pourpoint :
– Mets-moi un doigt dans le cul, j’aime bien !
Ce n’est pas un problème, j’humecte mon index de salive, inutilement puisque sa mouille sert ici aussi de lubrifiant naturel, je fais quelques allers et retours et quand ses petits cris me disent que j’ai trouvé le bon rythme, sans discontinuer mon doigtage, j’agace son clitoris de ma langue. Elle ne tient plus en place, elle grogne, ses mains agrippent des morceaux de draps pour en faire des boules qu’elle serre du plus fort de ses forces. Et puis c’est l’explosion, elle jouit bruyamment avant de se retrouver dans mes bras. Aucune pose, sa bouche cherche ma bouche, puis mes seins, mon sexe et mon cul mais aussi tout le reste car elle veut explorer tous les recoins de mon corps, et à ce jeu j’y prends aussi un plaisir intense.
Quand crevée, quelques heures plus tard et après avoir sommeillé, tendrement enlacée contre moi, elle se lèvera pour prendre une rapide douche et procéder à quelques ablutions, elle ne prononcera pas un mot se contentant de me signifier par un sourire et un clin d’œil que tout allait bien… J’ai dû faire de même, et puis l’une contre l’autre nous avons cherché le sommeil, je me suis rendue compte à un moment que Viviane avait une crise de larmes, j’ai laissé passer l’orage ne sachant que dire en continuant à la serrer. La crise passée, elle eut ses mots surprenants :
– Tu sais, ça fait une éternité que je n’ai pas dormi contre quelqu’un, je ne me souvenais pas que c’était si bon !
Pour toute réponse je lui ai balancé une claque complice sur le cul et nous nous sommes endormies. Le lendemain matin, pendant que prenions le petit déjeuner, elle me fit part de ses projets immédiats : elle se rendrait dès ce dimanche à Deauville, et de là elle s’organiserait.
Les adieux furent rapides :
– Je n’oublierais jamais cette nuit, Chanette, c’est pour cela que je… Que je…
Incapable de continuer, sa voix se cassa et ses yeux s’embuèrent
– Ne dis rien !
– On s’embrasse et je me sauve, à bientôt au téléphone, et surtout fais attention à Pierre !
Je l’avais un tout petit peu oublié celui-ci ! Sur mon portable, j’avais un message de Phil qui prosaïquement m’indiquait que la voie état libre. De ce côté aussi tout allait donc bien…
Pierre à Paris.
Cent fois dans sa tête, Pierre s’est répété ce qu’il dira à Chanette, ce qu’il lui répondra aussi, sur l’air de « si elle me dit ça, je lui dirais ça… » Il sonne, plein d’appréhension, ça ne répond pas, il tambourine, mais se rend à l’évidence, elle n’est pas dans son studio ! Sans doute n’est-elle pas encore arrivée, il décide de l’attendre dans la rue, il fait les cents pas, anxieux, reprenant espoir à chaque fois qu’une voiture se gare. A midi il se dit qu’il n’y croit plus mais remonte quand même, après tout il ne l’a peut-être pas vu entrer, ou alors il y a une autre porte, ou alors elle a dormi ici, c’est fou ce qu’on gamberge dans ce genre de situation ! Bien sûr, il n’y a personne, n’empêche qu’il attend encore 13 heures, puis 13 h 15 avant de quitter l’endroit, dépité. Il décide d’aller déjeuner, c’est qu’il commence aussi à avoir faim, n’ayant pas pris de vrai repas depuis le vendredi soir. Pas du tout envie de faire dans le gastronomique, il tourne, n’arrivant pas à se décider, puis décrète qu’il mangera mieux ce soir et se contente d’un sandwich.
Il lui vient alors une idée farfelue, le voici qui retourne au studio de Chanette, il glisse alors un mot qu’il coince dans le chambranle de la porte, il lui demande de la rappeler d’urgence sur son numéro de portable, il se dirige ensuite vers un ensemble de salles de cinéma mais rien ne lui dit pour l’instant, ce soir peut-être… alors, il déambule, noyé dans ses pensées. Ce n’est qu’en fin d’après-midi qu’il se dit que le fait d’avoir laissé un message sur la porte de sa dominatrice préférée n’était peut-être pas une si bonne idée que ça, et qu’exposer ainsi son numéro de portable était bien imprudent, alors encore une fois il y retourne afin de l’enlever.
Cette fois, la faim le tenaille, il se rend dans une brasserie du quartier St Lazare, commence par un whisky bien tassé, voilà qui le ragaillardit un petit peu, il en commande un deuxième, et puis après, promis juré, plus d’alcool, ou alors juste un troisième… Sa tête tourne, il a la lucidité de vouloir sortir d’ici, de prendre le frais. C’était quoi déjà ses projets pour la soirée : le restau, le ciné, l’hôtel. Il y a de grandes chances que seul le dernier élément aboutisse ! Mais ça ne va vraiment pas bien, à ce point qu’il éprouve le besoin de s’asseoir sur un banc. Ses paupières deviennent lourdes, il s’efforce de lutter contre le sommeil, le combat est trop inégal, et Pierre se met à ronfler.
Dimanche après-midi – Chanette
Plus le temps passe, plus je m’angoisse, nous sommes allés au ciné avec Phil, et j’ai eu du mal à m’intéresser au film idiot que nous avions choisi. J’ai un peu parlé de tout ça avec mon mari, mais sans insister outre mesure, il a toujours sous-estimé la dangerosité de mon métier et c’est aussi bien comme ça, et puis que pourrait-il faire ? Jouer le rôle du « protecteur » alors que je n’en ai jamais eu, non merci !
N’empêche qu’il me trotte dans la tête d’affreuses histoires de collègues qui se sont fait trucider par des clients qui avaient pété les plombs. Et si c’est ce que Luc veut faire, comment me protéger, si je refuse de le recevoir, il m’attendra en bas. Encore une fois je me souviens des conseils de Clara « c’est pathologique, ces mecs là avant de te descendre, il faut absolument qu’ils fassent un discours, à toi de t’arranger pour qu’il dure le plus longtemps possible, c’est la seule façon de leur faire baisser leur garde ! »
Mouais ! Pas évident !
Pierre de nouveau
Pierre ne comprend pas tout de suite. Il se demande ce qu’il fait là, sur ce banc parisien alors que le jour semble se lever.
Puis la mémoire lui revient, il a donc dormi tout ce temps-là ? Il est quelle heure d’abord ? Instinctivement il regarde son poignet mais aucun bracelet montre n’y est attaché. Il l’aurait oublié … Non puisqu’il l’avait ce matin quand il attendait devant l’immeuble où exerce Chanette. Il a dû le perdre en s’accrochant quelque part, à moins qu’on lui ait volé ? Alors un autre geste instinctif, il se tâte le veston. Horreur, on lui fait les poches, plus de portefeuille, plus de portemonnaie, plus de clés, plus de téléphone portable… Plus rien et son attache case s’est envolé aussi.
Il n’avait vraiment pas besoin de ça : il effectue les gestes idiots que l’on fait dans ses cas-là, il tâte de nouveau ses poches, regarde par terre avant de se rendre à l’évidence. Il demande l’heure, il est presque 7 heures du matin : comment gérer tout ce qu’il à faire, prévenir sa boite, il est trop tôt, idem pour se rendre chez Chanette, alors aller à la police faire une déclaration… Et puis il a faim, peut-être avant prendre un bon petit dej ? Mais non, pas de petit déjeuner puisqu’il n’a plus un sou. Au commissariat, c’est la galère, on le fait attendre plus d’une heure avant qu’un inspecteur peu amène daigne enregistrer sa plainte. Il est 8 h 30 quand il sort, une vitrine miroitée lui renvoie l’image d’un homme méconnaissable, mal peigné, pas rasé, les yeux cernés, les poignets et le col de sa chemise salis, la cravate et le pantalon chiffonnés… Une catastrophe ! Pas question d’aller à sa réunion dans cet état, mais il a la solution, et la solution a un nom et ce nom c’est Chanette. Si tout se passe bien, il pourra même se doucher et se raser chez elle, après il ira à sa banque, puis à son travail pour leur expliquer, et enfin à Londres. Si tout se passe bien… mais pourquoi est-ce que ça ne se passerait pas bien, les malentendus sont faits pour être dissipés, non ? Il recueillie un peu d’eau à une fontaine publique, se rafraîchit le visage, et se plaque les cheveux. Et c’est parti !
Lundi matin : Chanette
Il est donc probable que Luc se pointera aujourd’hui. Vu ses habitudes et son emploi du temps serré tel que me l’a décrit Viviane, il devrait être là vers 16 heures. J’examine toutes les hypothèses possibles, essaie d’écarter la pire, me dit qu’il en existe une aussi où je ne le reverrais jamais… Mais sinon que faire s’il se pointe ? Ça me fout un peu les boules parce que quelque que soient ses intentions, la solution consistant à lui claquer la porte au nez ne convient pas. Un mec aussi friqué peut avoir comme on dit des amis bien placés. Je ne fais rien d’illégal, mais il pourrait toujours essayer de me faire avoir des ennuis auprès du fisc ou auprès du syndic de l’immeuble. Et puis surtout, j’ai promis à Viviane d’essayer d’en savoir plus. C’est tout à fait moi, ça, de me placer toute seule dans une situation merdique.
J’ai demandé à une copine de venir un peu avant 16 heures avec son chien, et il n’est pas commode son chien…
– Tu commences par te montrer, les gens n’agissent pas pareil quand il y a un témoin potentiel, après tu te planques derrière la porte et tu écoutes, si je me racle la gorge, tu entres et tu lâches le clebs ! Lui précisais-je au téléphone.
J’ai souvent du monde le lundi matin, à peine suis-je montée qu’un premier client sonne, je ne me souviens pas l’avoir déjà vu, il avait rendez-vous la semaine dernière mais n’a pas pu venir et blablabla (refrain connu) on échange quelques mots afin que je puisse savoir ce qui l’intéresse, il m’a l’air « ouvert », tant mieux, ceux qui ne savent pas vraiment ce qu’ils veulent ont tendance à m’agacer. Il ne voit pas d’inconvénient à « partager » la séance avec un autre, je le fais patienter dans la salle d’attente en attendant que je finisse de me préparer, et deux minutes après en voici un second, un habitué, qui, lui, avait pris rendez-vous. Ma salle d’attente n’a qu’une place afin d’éviter les rencontres surprises, je le fais donc patienter dans la cuisine…
A 9 heures piles, je viens d’enfermer le premier client dans une cage au milieu du donjon. Mais voilà que l’on sonne de nouveau, c’est un vrai défilé ce matin ! Donc opération tiroir, celui qui est dans la cuisine rejoint la salle d’attente et je vais ouvrir ! Merde, c’est Luc, je ne l’attendais pas si tôt, il n’est pas dans son état habituel, lui si soigné d’ordinaire, il est là mal peigné, mal rasé, la cravate tourbichonnée. Je me retiens de lui demander ce qu’il lui est arrivé.
– Chanette, je vous dois des excuses…
– Oui, ben pour l’instant je suis occupée, je vous mets dans la salle d’attente, d’ailleurs ce sera dans la cuisine…
– Juste un mot…
– Vous entrez et vous m’attendez, on ne va pas discuter sur le palier !
Et voilà, je me suis laissée déstabiliser par son arrivée inopinée et par son état physique, et alors qu’il était pourtant simple de lui demander de revenir à 16 heures, je viens de faire entrer le loup dans la bergerie… Si vraiment il veut me zigouiller, je risque d’être une proie trop facile… J’ai la trouille.
Je laisse donc Luc, puis demande à mon habitué s’il voit un inconvénient à ce que je le domine en même temps qu’un autre. Ça ne l’embête pas du tout et il ne souhaite pas non plus porter de masque. Je le fais se déshabiller et l’attache à la croix de Saint André. Tout cela pour gagner du temps, essayer de réfléchir, mais je m’en montre bien incapable. Je pense néanmoins à préparer un sac en plastique dans lequel je place une enveloppe avec l’acompte de Luc, diminué de mes heures perdues, son collier très cher ainsi que d’autres babioles qu’il m’a offertes et dont je n’ai que faire !
J’ai la tremblote, je souffle un bon coup. Qu’est-ce qu’il va bien vouloir me raconter ? D’autant que la situation me paraît faussée d’avance ? Il est bien évident que s’il avait des intentions inavouables envers sa femme et envers moi, il ne va pas me le dire ! Je vais donc le laisser parler, mais en m’arrangeant pour que ça ne s’éternise pas et en espérant que cette confrontation ne tourne pas au drame.
Je revêts un kimono, prend une bombe de lacrymo et la fourre dans ma poche, sans desserrer ma main. Courage, Chanette ! Je pousse rapidement la porte de la cuisine et là je dois me frotter les yeux pour me demander si je rêve ou non ! Luc, le grand bourgeois lyonnais m’a carrément piqué un yaourt à 0% dans le frigo et il est en train de se le goinfrer, et avec une de mes petites cuillères en plus ! Il devient rouge de confusion :
– Je suis désolé, j’avais faim, je n’ai presque rien mangé ce week-end, je vais vous expliquer…
Il est devenu fou, ma fuite et celle de sa femme l’ont rendu fou ! Me dis-je.
– Je vous donne cinq minutes, pas une de plus. Je vous préviens que je me suis protégée pour cet entretien, je ne vais pas vous dire comment, mais si vous avez des intentions agressives, ça risque de très mal se passer…
– Chanette, mais comment me jugez-vous, je n’ai aucune intention agressive, comme vous dites ! Je suis venu dissiper un malentendu, vous m’avez reproché de ne pas avoir parlé de domination à ma femme
– Vous aviez pourtant promis… l’interrompais-je malgré moi.
– Mais la raison en est toute simple, je n’avais à aucun moment l’intention de mêler mon épouse à ce genre de jeux, en fait…
– C’est pourtant ce que vous m’aviez dit au départ !
– Oui je sais, mais je vous en prie, laissez-moi parler, je vous voulais pour moi, rien que pour moi tout un week-end, je pensais que pour que vous puissiez accepter, il me fallait vous dire que nous ferions surtout de la domination, alors je vous ai parlé de mon épouse, je ne pouvais pas me rétracter quand vous avez demandé des garanties, et pour moi, ce n’était pas important, puisque encore une fois, ma femme était exclue de ces jeux !
– Comment voulez-vous que je vous croie ? Votre femme aurait fait quoi pendant que je vous dominais, elle aurait regardé ?
S’il pouvait tomber dans le piège que je lui tends !
– Non, nous aurions fait ça, après qu’elle soit partie ! Son départ était programmé !
– Hein ?
– Plusieurs fois, elle m’avait fait part de son intention de partir, elle a souvent été à deux doigts de le faire mais elle ne l’a jamais fait, il fallait une goutte d’eau pour faire déborder le vase, un événement, et cet événement c’était votre venue !
N’importe quoi ! J’évite de crier à cause de mes clients mais je m’énerve :
– Vous mélangez tout ! Si vous vouliez du S.M. pendant un week-end, on aurait très bien pu le faire à Paris ! Vos histoires conjugales ne me regardent pas, et je trouve que me mêler à ça est abject ! Me voilà réduit au rôle de la goutte d’eau ! Vous vous rendez compte de ce que vous dites ?
Il encaisse mal ma soudaine mauvaise humeur mais reprend :
– Je n’ai en fait commis que deux erreurs, des trucs insignifiants et qui ont pris des proportions démesurées, je n’aurais jamais dû vous parler de S.M. avec ma femme, et je n’aurais pas dû inventer cette histoire de secrétaire…
– Ah, bon ? C’est pourtant bien ce qui a fait partir votre femme, je croyais que c’était ce que vous vouliez ! Vous dites n’importe quoi ! Je ne saurais jamais ce qui me serait arrivée si j’étais restée entre vos griffes, et ce qui serait arrivé à votre femme, alors…
– Mais Chanette, vous ne comprenez pas…
– Silence, vous allez me foutre le camp d’ici, vous allez reprendre vos colifichets, et je vous interdis de remettre les pieds ici, allez ouste !
Et je lui tends le sac en plastique qu’il prend machinalement, il est livide ! J’ouvre la porte de la cuisine et vais pour ouvrir celle de l’entrée…
– Juste un dernier mot, et je vais disparaître de votre vie, je vous supplie de m’écouter…
Malgré l’envie d’en finir je l’écoutais, espérant sans doute apprendre quelque chose…
– Soyez bref, vous me faite perdre mon temps !
– J’étais venu ici pour deux choses, dissiper un malentendu, mais vous ne voulez pas m’entendre, tant pis. J’aurais aussi voulu renouveler mon invitation chez moi à Lyon, cette fois nous n’aurions été que tous les deux, sans surprise possible !
– Ah tiens, vous aviez trouvé un plan de remplacement !
– Vous ne pouvez pas savoir à quel point vous me décevez avec vos sarcasmes !
– Bon, vous savez partir tout seul ? Ou il faut que je vous pousse ?
– Poussez-moi donc, au point où j’en suis…
Bizarrement cette réflexion me surprend, il a vraiment l’air au trente sixième dessous. Et j’hésite un peu à en finir.
– Je peux bien tout vous dire maintenant, puisque tout est foutu… Vous vous demandiez ce que je cherchais en vous attirant à Lyon, et bien je cherchais à vous séduire, et je pensais sérieusement y arriver. J’escomptais aussi que la crise avec ma femme se produirait, me laissant dans un état de désarroi apparent, je comptais aussi là-dessus pour que cela nous rapproche davantage….
– Salaud !
– N’en rajoutez pas, la coupe est pleine ! J’étais amoureux de vous Chanette, je ne sais pas si en ce moment je le suis encore, mais c’est une histoire d’amour que je voulais jouer ce week-end… je vous ai aimé Chanette comme jamais je n’ai aimé aucune femme ! Je vous quitte, je vous laisse faire votre métier, vous le faites très bien…
Il disparut alors dans l’escalier, me laissant avec une drôle d’impression ! Une façon très élégante de me rappeler que je ne suis qu’une « pute » mais à quoi bon relever…
Ouf ! Plus tard il me faudrait faire le tri dans tout ça. Disait-il la vérité, une partie de la vérité ? J’avais sinon beau chercher, je ne voyais pas trop ce que j’aurais à me reprocher dans cette aventure. Je soufflais un grand coup, avalais un grand verre d’eau, l’essentiel était que cette épreuve soit passée, et qu’elle s’était passée « pacifiquement » ! Reviendrait-il ? Peu probable, par contre il essaierait peut-être de me téléphoner si l’esprit d’escalier lui susurrait qu’il avait oublié de me dire quelque chose… Par précaution je fermais mon portable, puis je retournais vers mes soumis !
Me concentrer sur ce que je fais, ne plus penser à tout ça…
Mes deux soumis me regardent arriver, j’espère que rien dans mon attitude ne peut faire deviner que je viens de baliser pendant 10 minutes.
– Alors mes petites larves, on a été sages ?
– Oui, Maîtresse ! Répond l’habitué.
Je fais sortir le nouveau de sa cage et le fait se placer à genoux à mes côtés, puis je me saisis de deux belles pinces à seins que j’accroche à mon habitué avant de jouer avec. Effet garanti, il pousse des râlements classiques où se mélangent la douleur et le plaisir, tandis que son sexe se met à bander selon une très jolie verticalité. Un coup d’œil vers le nouveau qui se met à bander aussi quoique de plus molle façon. Super ! Je vais m’amuser !
– Dis donc toi ! Tu crois que je ne vois pas ? C’est sa bite qui te fait bander comme ça !
– Je ne sais pas, maîtresse, c’est un ensemble je crois !
Je lui balance une gifle
– Qu’est-ce qu’on dit ?
– Merci Maîtresse !
– Bon alors, reprenons ! Comment tu la trouves, sa bite à cet esclave !
– Elle est belle, maîtresse !
Je la prends dans mes mains, esquisse quelques mouvement de masturbation, décalotte bien le gland tout violacé ce qui a pour effet de la raidir encore plus ! Mon nouveau ne tient plus en place :
– Tu aimerais bien la sucer ? Hein ?
– Oui, maîtresse !
– C’est tout ce que tu es, un suceur de bites !
– Oui, maîtresse !
– Tu en as sucé beaucoup de bites dans ta vie ?
– Ben, non… les occasions sont assez rares !
– Et tu crois que je vais te la laisser sucer, celle-ci ?
– C’est vous qui décidez Maîtresse !
– Tu ne crois pas que tu te trompes d’adresse ? C’est pour subir ma loi qu’on vient ici, pour souffrir… alors que là j’ai plutôt l’impression que si je te le laisse le sucer, je vais te faire un cadeau…
– C’est comme vous voulez, Maîtresse !
Pas chiant le mec !
– Et tu aimerais qu’il t’encule avec sa belle bite ?
– Peut-être pas, non… pas tout le même jour…
– C’est ce qu’on va voir !
Je l’attache alors sur la croix de St André, contre le soumis habitué de façon à ce qu’ils soient l’un devant l’autre, le nouveau me présentant son dos et ses fesses, puis me saisissant d’un martinet, je me mets à lui frapper l’arrière train. Il encaisse assez mal, aussi je ne force pas, mon objectif c’est qu’il sorte d’ici tout content et surtout avec l’envie de revenir… Tout un art ! Il a maintenant le cul tout rouge…, Je le détache et vais m’harnacher d’un bon gode ceinture.
– Tien lèche ça, avant d’en sucer une vraie !
Il ne se fait pas prier et pendant qu’il me gobe mon pénis factice, je titille les seins du premier soumis…
…Et voilà qu’on sonne ! Merde, pourvu que ce ne soit pas Luc qui revienne, si c’est le cas je le laisse à la porte… je me précipite ver l’œilleton après avoir enfilé mon kimono comme une barbare !
Phil !
Que vient-il faire ici ? Il n’y met jamais les pieds, et il devrait être dans son magasin à cette heure-là, j’ouvre fébrile, m’attendant à une catastrophe !
– Chanette, personne n’arrive à te joindre, t’as fermé ton portable ou quoi ?
– Oui ! Qu’est ce qui se passe ?
– C’est Marzia qui m’a demandé de te joindre par n’importe quel moyen, elle a un empêchement familial, tu lui avais demandé de passer cet après-midi…
Ouf ! La copine avec son chien… Ça n’a plus aucune importance maintenant ! Je vais finir par avoir une attaque, moi avec toutes ces émotions…
– C’est pas grave du tout, je t’expliquerais ce soir !
Et puis j’ai soudain envie de délirer :
– Tu as cinq minutes ?
– Ben, non il faut que j’y retourne…
– Dommage, je t’aurais bien fait sucer par un de mes clients….
– Chanette, tu ne péterais pas un peu les plombs, là ?
– Allez, je te laisse, à ce soir ! C’est gentil de t’être déplacé….
Je lui fais un bisou…
Il va pour sortir ! Semble hésiter !
– Tu ne parlais pas sérieusement quand même ?
– Parler de quoi ?
– De me faire sucer…
– Bouges pas, je reviens !
Je traîne mon soumis en laisse à quatre pattes jusqu’à Phil !
– Tu vois, c’est un client qui vient juste pour se faire sucer, il m’a demandé si je n’avais pas une bonne pute pour lui faire une pipe, alors j’ai tout de suite pensé à toi ! Alors, allons-y, tu le débraguette, tu le prends dans ta bouche, quand il sera bien bandé tu lui baisse son pantalon et là tu le pompes à fond ! C’est compris esclave !
– Oui, maîtresse !
Pierre
C’est un homme brisé qui franchit le portail de l’immeuble où Chanette exerce ses talents. Juste avant, il a extrait l’enveloppe du sac en plastique et la glissé dans sa boite aux lettres. Le reste atterrira dans une poubelle publique. Chemin faisant il découvre un square et s’assoit sur un banc. Il peut encore se ressaisir, s’il se rend à son siège parisien, même dans cet état, on l’écoutera, on l’aidera, et après avoir surmonté cette terrible déconvenue, il saura sans doute repartir du bon pied. Il lui suffit de se lever, mais aller à pied jusqu’à La Défense, ce n’est pas si loin que ça, une bonne heure, peut-être deux… Il décide d’attendre un peu, une demi-heure, une heure, il n’arrive tout simplement pas à faire ce geste. Midi est maintenant passé depuis longtemps, il a faim et soif, il regrette ne pas avoir prélevé quelques sous dans l’enveloppe qui lui aurait permis de prendre un taxi, il se lève, non pas pour aller vers les tours de La Défense mais pour chercher une fontaine, sa soif apaisée, reste la faim. Mais bon sang, quand ses collègues le verront comme ça, ils iront immédiatement lui chercher un sandwich, pourquoi n’a-t-il donc pas la volonté d’y aller ! Parce que à quoi bon, signer des contrats, empocher du fric, pourquoi faire ? Pour se retrouver tout seul dans son immense baraque Lyonnaise sans Chanette… A quoi bon… Il cherche une rue commerçante, en ce milieu d’après-midi il n’y a pas trop de monde, il repère une épicerie et l’air de rien, lui qui négociait encore le mois dernier des contrats portant sur des millions de dollars avec des industriels japonais il pique une grosse pomme, se faufile en courant dans les rues adjacentes avant de la dévorer avec honte…
Chanette
Ces événements m’ont plus intrigué que contrarié. J’ai fait un bref compte rendu à Viviane du court échange verbal que j’ai eu avec son mari. Elle a tout comme moi conclu qu’il n’avait peut-être pas tout dit. On s’est revu trois ou quatre fois parfois assez intimement, avant de se perdre de vue. J’appris qu’elle avait demandé le divorce mais que la procédure restait bloquée, Pierre ayant proprement disparu de la circulation. Elle s’était de ses deniers achetée un petit appartement dans l’est Parisien et vivait pour l’instant de ses économies…
Epilogue
Plusieurs mois plus tard, mi-décembre à Paris
Je faisais ce jour là quelques courses dans la perspective des fêtes de fin d’années et mes pas m’avaient conduit vers un grand magasin de la rive gauche. Mes paquets sous le bras je me dirige vers la bouche du métro. Mon regard croise alors celui d’un clochard faisant la manche avec devant lui un simple bout de carton sur lequel quelques mots sont griffonnés. J’ai tendance à avoir le cœur sur la main, mais ne peut non plus donner à tout le monde, je passe donc mon chemin. Mais un déclic eut alors lieu, voulant être sûre je reviens sur mes pas… et m’approche de cet homme amaigri, barbu, pas très net, sur son carton il est simplement indiqué : » j’ai faim »
– Luc !
– Vous m’avez reconnu ?
Je ne réponds pas, mais extirpe un billet de 20 euros de mon portefeuille et lui tend !
– Tenez, allez manger !
– Merci Chanette !
Et j’allais m’éloigner quand je l’entendis murmurer :
– Je suis devenu croyant, je ne voulais pas retourner chez vous, mais j’ai prié Dieu pour que nous puissions nous rencontrer de nouveau un jour !
– Et bien votre vœu est exaucé !
Que répondre d’autre ? Que des banalités, et j’espère qu’il ne va pas devenir collant…
– Parce que je voulais juste vous dire un mot, c’est très court…
S’il me refait une déclaration d’amour, je me sauve à toutes jambes… Il se lève et s’apprête à prendre la direction opposée à celle du métro.
– Je voulais vous dire que la vacherie que je vous ai sorti, l’autre jour, je ne la pensais pas et vous ne la méritiez pas… Adieu Chanette, je crois que je vais passer une bonne journée.
En descendant les marches de la station de métro je m’étonnais d’arborer un large sourire tout en ayant quelques larmes dans les yeux…
Fin